PATRICIA GUENOT
Spectre
de l'effroi
Mon âme se tapit dans l'abîme des rêves
Dont le berceau échappe au labyrinthe obscur
Où mes pensées blessées par l'ombre du futur
S'éteignent à l'orée de la nuit qui s'achève.
Le spectre de l'effroi menace de son glaive
Le timide soleil, accroché dans l'azur,
Qui s'effondre en dardant un dernier feu impur
Sur l'aube silencieuse offrant sa courte trêve.
Un cauchemar soudain étend son voile noir
Sur mon cœur esseulé qu'un pâle désespoir
Plonge dans le désert du futur monotone.
Les serres de la peur déchirent mon esprit,
Tandis qu'un cri lugubre éperdument résonne
Dans un froid tourbillon de souvenirs flétris.
Flambant carnaval
Un joyeux carrousel de masques tourbillonne
Sur la piste étoilée où les fringants danseurs
Profitent de l'écran qui voile leur pudeur
Pour épancher leur cour doux comme un soir d'automne.
Au rythme des chansons, les jeunes gens frissonnent
Dans la nuit déchirée par l'immense clameur
Des rires enflammés exhalant la candeur
Des couples inédits dont le bonheur rayonne.
Portés par la gaieté du flambant carnaval,
Les amoureux tournoient sous les lampions du bal,
Jusqu'à la douce ivresse exaltant leur tendresse.
Les masques déchirés aux heures du matin
Font place à l'émotion des lèvres qui se pressent,
Dans une symphonie de frémissants instincts.
Jaune
chrome.
Crâneur
accoudé au comptoir.
Jaune
tabac,
Jaune
incertain,
Foncé,
café,
Jaune
câlin.
Tourbillon
de couleurs insipides.
Dans
le café,
Sous
la lumière avide,
Devant
les buveurs assoiffés,
Je
m'approche, timide.
Silence
placide qui te blesse.
Je
souris.
Je
grimace.
J'efface
Tes
doutes sagaces.
J'enlace
ton corps embarrassé.
Étonnée,
Tu ris jaune.
Je
souffle sur tes réticences
Qui
m'agacent.
Je
plonge dans les plis
De
nos plaisirs fleuris.
Je
bois les mots doux
De
nos fugaces rendez-vous.
Je
bois le vin
De tes défaillances.
Je
sculpte le lit de notre ivresse
À l’aube du jour où s’embrase
L’arc-en-ciel de nos caresses.
Plongée dans les replis de ses pensées moroses,
La photographe hésite à mettre son savoir
Au profit du modèle adossé au miroir,
Exhibant fièrement sa peau de satin rose.
Le défilé des corps que son métier impose
Se transforme en blessure au fond de ses yeux noirs,
Lassés de célébrer le mensonger pouvoir
De fragiles beautés alanguies dans leurs poses.
Quand les feux de son flash achèvent de pleuvoir
Sur la fille au regard tranchant comme un rasoir,
Un voile de torpeur doucement se dépose.
Les audacieux clichés qui jonchent ses tiroirs
Embaument la poussière enveloppant les choses
D’un silencieux linceul au parfum de nécrose.
Je serais partie en enfer
Pour un paquet de cigarettes.
Malgré mes maudits maux de tête,
Je fumais été comme hiver.
Bien avant la hausse des prix.,
J’ai décidé de renoncer
À ce qui me faisait tousser,
Un soir, lors d’un soudain pari.
Depuis ma sage décision,
Je cueille des bouquets de fleurs
Dont les délicieuses senteurs
Cicatrisent ma frustration.
Loin de mon tabac désolant,
Je goûte les baisers complices
De ma fée dont les yeux se plissent
Au seuil d’un plaisir insolent.
J’accorderai ton âme aux couleurs du bonheur,
Assemblées par ma main en taches éclatantes
Formant un arc-en-ciel à l’alchimie vibrante,
Qui versera sa joie dans le fond de ton cœur.
Je mêlerai le vert des marines fraîcheurs
Au rouge incandescent des laves jaillissantes
Qui masqueront le noir des cryptes effrayantes
Où le temps ravageur se livre à des horreurs.
J’ajouterai le bleu de l’insondable espace,
Impassible témoin des mortelles grimaces,
Au blanc immaculé des serments éternels.
J’achèverai mon œuvre en posant une touche
Du jaune de la lune illuminant le ciel
Sous le regard jaloux de planètes farouches.
J’écris des mélodies aux couleurs de la gamme
Sur mon clavier subtil à la voix de cristal,
Qui cisèle des sons dont le flot triomphal
Exhale des accords brûlants comme des flammes.
Le Do jaune de l’or annonce le programme,
Suivi du Ré orange exaltant le moral.
Le Mi rouge accordé à la fureur des lames
S’unit au Fa violet du satin sépulcral.
Puis le Sol indigo d’une étendue marine
Se mélange au La bleu du ciel qui s’illumine
Sous les feux d’un soleil au parfum de printemps.
Le Si vert des forêts à la beauté placide
Forme la conclusion du cantique éclatant
Que je joue pour tromper le silence livide.
Sur la planète bleue,
De petits hommes verts
Tirent à boulets rouges
Sur les humains qui bougent
Pour éteindre l’enfer
Qui leur brûle les yeux.
Au cœur de mes nuits blanches
Tapissées d’idées noires,
Dans mes draps bleu pervenche,
Je rêve d’un désert
Pour composer des vers
Au pays de l’espoir.
Lassée de mes peurs bleues,
Je pars de but en blanc.
Je cours me mettre au vert,
Couler des jours heureux,
Loin de mon triste écran
Que je jette à la mer.
Près de mon cordon bleu,
Je vois la vie en rose
Même si je ris jaune
Devant les autochtones
Qui préfèrent la prose
À mes sonnets radieux.
Un tourbillon cinglant de profondes couleurs
S’étire violemment dans les plis de mon âme
Condamnée à subir un arc-en-ciel de flammes
Dont les langues rougies me calcinent le cœur.
Mes teintes préférées exaltent ma fureur.
Le bleu métal s’accorde à la froideur des lames
Qui sculptent dans mon corps des blessures infâmes
Vomissant des torrents de sanglantes douleurs.
Le jaune du citron déverse son acide
Dans mon esprit noirci dont la joie se dévide
Sur le rouet cruel de l’avenir glacé.
Le vert de moisissure étale sa poussière
Sur l’écheveau obscur de mes espoirs blessés
Qui meurent doucement au creux de mes paupières.
Attends-moi
dans tes envies obscures.
Déchire-moi
dans les déliés de ton écriture.
Prends-moi
dans ta littérature.
Abroge
mes blessures.
Gratte
mes voyelles et mes consonnes.
Joue
des palpitations de ma personne.
Invente
l’alphabet de nos vertiges.
Ris
des carcans qui nous obligent
À
nous trahir.
Danse
au centre de mon plaisir.
Lèche
les couleurs de nos joies.
Cueille
les perles de désir
Qui
colorent nos émois.
Chante
la frénésie de nos corps
Fondus
en un complice accord
Dans
un déchaînement radieux
De
regards silencieux,
Captifs
de nos plaisirs avides,
Aux portes de l’aube livide,
Pavée
de nos mots incendiaires,
Noyés
dans le lit de nos mystères.
Une chape de plomb posée sur l’horizon
Assombrit la cité aux habitants austères
Dont le flot se répand à portée de misère
Dans les crasseux faubourgs au parfum de prison.
Soudain le ciel vomit des éclairs à foison
Dont les sanglots cinglants enflamment les artères
De la ville engourdie dans un ennui polaire,
Dénoué en clameur ivre de déraison.
Un ouragan soudain déchire le silence
Qui fait place aux accords d’un chant de délivrance,
Dans un déferlement de plaisirs insolents.
Le matin se déroule en fête frénétique
Consacrée au bonheur, sous le regard brûlant
Du futur déversant sa soyeuse musique.
Dans ce violent froid de canard,
Puisque le bât blesse, je pars.
Tenaillée par ma faim de loup,
Je prends mes jambes à mon cou.
Loin de ta langue de vipère,
Lassée de la vache enragée
Que tu m’as souvent fait manger,
Je me ramasse à la cuillère.
Tu montais sur tes grands chevaux
Avec ta tête de cochon.
Vaincue, je faisais le dos rond
Dès que tu crachais des crapauds.
Je reprends du poil de la bête.
J’ai l’estomac dans les talons.
Désormais, gaie comme un pinson,
Je frétille comme une ablette.
Une obscure musique aux accords monotones
Répand dans mon oreille une austère torpeur
Dont les nappes glacées ternissent les couleurs
De mon rêve effrité en amertume aphone.
Guidée par la chanson dont les notes résonnent
Jusqu’au jardin désert d’où jaillissent mes pleurs,
J’arrache les chardons enfoncés dans mon cœur
Par la main de l’amie qui ce soir m’abandonne.
De ma blessure ouverte, un sang lourd et foncé
S’échappe en emportant mon espoir offensé
Vers le puits calciné où ma vie se défile.
Délivrée de moi-même, épuisée, je m’endors
Dans le berceau cruel du silence immobile
Tandis qu’un froid mortel s’empare de mon corps.
J’exècre l’animal tapi dans ma cuisine
Qui, au lieu de chasser de fébriles souris,
Me surveille d’un œil débordant de mépris
Avant de chaparder mes exquises sardines.
Porté par l’âpreté de ses envies félines,
Il saccage gaiement mes objets favoris,
Jette sournoisement des paquets de poils gris
Sur les riches habits de mes bonnes copines.
Ses griffes acérées comme un froid bistouri
Menacent le bonheur de mes deux canaris,
Apeurés par le monstre à l’humeur assassine.
Lassée de supporter l’ignoble mistigri
Dont les taquineries ébranlent ma routine,
Je songe à le noyer dans l’eau de la piscine.
En dérive intérieure, adossée au hasard,
Je brûle mes clichés constellés de souffrances
Dans le brasier sanglant où mon âme s’élance,
Aux portes de l’ennui érigé en rempart.
Portée par l’âpreté d’un cinglant cauchemar
Qui creuse un puits cruel à la noirceur immense,
J’erre dans le désert de ma désespérance
Sous l’œil indifférent d’un vieux soleil blafard.
J’appelle l’avenir à briser le silence
Qui drape de pudeur mes sombres défaillances,
Afin de préparer mon funèbre départ.
Quand un amer crachin lave mes réticences,
J’offre mon corps déchu au palpitant poignard
Dont la lame glacée déchire le brouillard.
Pâleur crayeuse,
Constellée de rougeurs éparses,
Issues de grattages nonchalants.
Corps sec, tendu comme un arc
Sur les os épais, lourds et saillants.
Sur le visage osseux en lame de couteau,
Le lacis des veines apparaît sous la peau.
Le cheveu châtain, rebelle, se répand
En mèches incertaines
Sur le front droit, lisse et austère.
Le nez arbore fièrement sur son arête
Une bosse incongrue,
Stigmate d’un accident lointain.
Les sourcils dociles
S’allongent calmement
Sur les paupières fines,
Ornées de cils veloutés et habiles
Qui dansent un ballet délicat
Sur les lacs étales des yeux noisette.
La bouche étire ses lèvres pulpeuses, vermeilles,
Aux contours volontaires et gourmands,
Jusqu’aux commissures discrètement plissées
En un rictus amer.
La mâchoire grince, se crispe,
Ancrée sur le menton oblong,
Contractée sur un refus préconçu, tranchant,
Démenti par la finesse gracieuse du cou
Qui se dresse doucement
Pour cueillir une caresse timide,
Un baiser rapide.
Impatiente,
J’attends,
Le cœur radieux
Comme le printemps.
Je lècherai le lait
De tes blessures.
Je délierai les chaînes
De tes réticences secrètes.
Je lirai le récit de tes cicatrices amères.
Je déchirerai le voile obscur
De ta pudeur sibylline.
Je percerai tes peurs silencieuses.
J’inventerai l’alchimie soyeuse
De nos vertiges lascifs.
Je creuserai des puits de joie
Sur ta peau incendiée,
Tendue vers l’infini de tes plaisirs.
Mes lèvres affamées
Cueilleront les perles de sueur
De ton ventre incandescent.
Ma langue avide dansera
Le ballet frénétique
De nos désirs mêlés
Sur ton corps enflammé,
Jusqu’au jaillissement fertile
De tes soupirs extatiques.
J’avance à pas menus sur le chemin sévère
De ma vie constellée de tourments vigoureux
Qui jouent à mon oreille un hymne ténébreux
Dont les notes glacées exaltent ma misère.
Depuis que je suis née, les jours crépusculaires
Défilent sans répit dans mon cœur malheureux,
Accordé à l’ennui que les faubourgs ombreux
Déversent jusqu’au fond de mon corps solitaire.
Dans le désert obscur de mon sort désastreux,
L’ombre de l’avenir au visage cireux
Se répand en sanglots de tristesse polaire.
Puisque ma destinée joue mon esprit peureux
Aux dés du désespoir où meurent mes chimères,
J’exhorte le néant à briser mon calvaire.
Sorti de son caveau dans un bruit de métal,
Le vampire assoiffé, armé de lourdes chaînes,
Drapé dans son manteau de cruauté obscène,
Harcèle les passants à l’orée du canal.
Précédé par l’éclat de son rire infernal,
Porté par son désir de viande fraîche humaine,
Il traque un vagabond dont l’odeur de gangrène
Déclenche dans son être un dégoût viscéral.
Guidé par la fureur de sa faim souveraine,
Il hante la cité dont l’horrible oxygène
Menace la vigueur de son corps sépulcral.
Quand un froid ténébreux s’infiltre dans ses veines,
Il mord à pleines dents un touriste banal
Avant d’aller danser au royaume du mal.
Le voile de silence entourant tes secrets
Attise mon désir à tel point que j’exhorte
Mon sourire à ouvrir de ton âme la porte
Au battant plus épais qu’une immense forêt.
Prise dans les filets de tes nobles attraits,
Je sculpte un puits de joie dans tes illusions mortes.
Je cultive un jardin dont la beauté conforte
Ton esprit dévasté, obscur comme un marais.
Je compose un refrain dont les notes subtiles
Abattent les remparts de ton âme fébrile
Dans une frénésie de bonheur insolent.
Quand l’étang de tes yeux accroche mon visage,
J’offre à ton cœur meurtri mes sentiments brûlants
Afin de te guider vers mon radieux rivage.
Géométrie, déploie tes joyeuses figures.
Cercle, roi de l’ennui, au terme indéfini,
Tes points, jumeaux serrés, définissent le nid
Où ton centre s’inscrit, loin de ta quadrature.
Triangle, étire-toi, allonge ta stature.
Du haut de ton sommet qui donne le tournis,
Étends tes traits pentus vers tes angles unis
Par ta base où s’élève ardemment ta structure.
Rectangle, deux à deux s’alignent tes côtés
Comme ceux d’un carré que des calculs ratés
Forceraient à former une étendue rebelle.
Droite, tranche gaiement l’espace traversé
En deux mondes disjoints dont ta ligne cruelle
Contraindra l’harmonie à s’écrire au passé.
Sur son visage oblong qu’un soleil monotone
Éclaire doucement d’un rayon langoureux,
J’aperçois un rivage au sable chaleureux
Que caresse un zéphyr aux portes de l’automne.
Je devine un pays où des chansons résonnent,
Accordées à la joie des jeunes amoureux
Échangeant à mi-voix des serments liquoreux
Sous des arbres charmants dont les branchent frissonnent.
Plongée dans les reflets du lac de son regard,
Je me mêle au ballet des fleurs de nénuphar
Assemblées en tableau aux couleurs éclatantes.
Guidée par son parfum attisant mon désir,
Je cueille des baisers sur sa lèvre tremblante
Dont le tendre velours embrase l’avenir.
Le désir silencieux et poignant d’une sœur
Qui saurait m’apaiser par son gracieux sourire,
M’apprendrait patiemment à lire et à écrire,
Palpite chaque jour dans le fond de mon cœur.
Elle m’inventerait un monde de douceur,
M’emmènerait le soir sur son précieux navire
Découvrir les secrets d’un merveilleux empire
Constellé de jardins aux chatoyantes fleurs.
Elle me bercerait pour éteindre mes peines,
Poserait sur ma joue sa main de porcelaine
Afin de m’entraîner vers un calme sommeil.
Lorsque j’aurais lesté mon âme de sagesse,
J’écrirais un sonnet invitant le soleil
À darder sur ma sœur ses rayons de tendresse.
N’espère pas qu’un homme apparaisse à ta porte
Afin de fracturer le verrou de ton cœur.
Saisis dès à présent les rênes du bonheur
Au lieu de t’écrouler comme une feuille morte.
Écoute les conseils de l’ami qui t’exhorte
À cueillir aujourd’hui les perles de douceur
Qu’il t’offre tendrement pour effacer tes pleurs
Pendant que son regard calmement te conforte.
Dans l’écrin chaleureux de ton radieux jardin,
Laisse-toi envahir par le plaisir soudain
Q’un parfum enivrant insuffle dans ton âme.
Pour retrouver bientôt ta confiance d’enfant,
Consume ton chagrin dans les joyeuses flammes
Que
darde sur ta peau un soleil triomphant.
Ayant bu des barils ce matin, je chancelle
Jusqu’au banc poussiéreux du tranquille jardin
Où je vais m’assoupir dans le petit matin
Avant qu’un gai soleil sur ma peau n’étincelle.
Je regarde un pigeon, perché sur la tonnelle,
Lâcher ses excréments sur la chaise en rotin
Qu’occupe un garçonnet dont le rire argentin
Agace un vieux braillant sa soif sempiternelle.
Bruyamment précédé par ses cris énervants,
Un bataillon d’oiseaux s’agite dans le vent,
Dans une frénésie de danses saugrenues.
Quand l’escadron ailé lâche ses fiers soldats
Sur les trottoirs bondés de la grande avenue,
Je cours participer à cette corrida.
Un jour de déraison,
Elle croisera ta route.
Vos cœurs à l’unisson
Vibreront goutte à goutte.
Elle abrogera tes doutes.
Ancrée au centre exact
De tes rêves secrets,
Elle hante tes pensées,
S’invite dans ton avenir,
Condamne ta vie
Vide sans elle.
Elle écoute ton silence.
Elle sait le poids de ta solitude.
Elle lèche le poison
De tes insomnies.
Elle peint l’horizon
Aux couleurs de tes envies.
Mesure
d'audience et statistiques
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