Ecrire par dessus tout

 

Pour Ceux-là, je dis.

Le monde ébloui de lui-même
et par lui-même médusé
de ses révérencieux « je t'aime »
de ses vertiges tant usés,
ses gardes fous
dont je me fous,

le monde, en sa bestiale errance
de lois inversées en recours
pour l'Etre en paix comme en souffrance,
l'homme en château, l'autre en sa cours,
tombe à genoux
et je m'en fous !

Le monde fatigue mon âme
depuis sa morne déraison
à souiller l'enfant, tair' la femme
et tenir l'homme en ses prisons.
ces mains qu'on cloue
là, je m'en fous.

Le monde, insalubre lieu-dit,
mièvre demeure et sombre plaie !
Le monde - pour Ceux-là - je dis,
aussi fort que te voici laid :
« Ceux qui s'y perdent
ainsi t'emmerdent ! »

Le site d'Alain Girard :
http://perso.wanadoo.fr/des.mots.au.monde/

 

Quatrain

Et par les vents et les tempêtes
brandir la verve du combat,
celle qui sied aux Poètes:
"Les mots d'amour qu'on dit tout bas"!


Enfin tourner le dos !

Le tourbillon du temps exhibe, en contre jour,
les sursauts incertains d'un homme inhabité,
ni les soleils des riens, ni les pluies des toujours
n'entrouvriront la porte de sa liberté.

Sur le mur, en guenille au pourtour des saisons,
là où il s'appuyait, en ses regards rebelles,
l'érosion des tristesses blêmit sa maison,
l'ombre, en son contre jour, évoque une poubelle.

Il rentrerait chez lui, écrirait son histoire
mais le rêve ne peut définir la pensée,
et l'aube de ses droits se lève un peu trop tard,
il sait, au fond de lui, comme il en a assez !

Ce fut, en d'autres jours, qu'il combattit sans trêve,
les forces de l'instinct s'épuisent peu à peu,
comme le temps est court ! comme la vie est brève !
et son ombre, ici-bas, maintenant est en feu !

De ce pas négocié à de vieilles blessures
que la vie déversa en quelques gouttes d'eau
sur son chemin, perdu, seul ainsi le rassure
ce geste qui convient. enfin tourner le dos !




Alors, d'un geste grave


Et puis je vis le mond' dans le trou des toilettes,
est-il un autre endroit pour mieux l'apercevoir
en ces jours où les champs inondés de violettes
colorent, de nos vies, d'eau rouge les lavoirs ?

Les femmes battaient là le linge et dans la plaine
rayonnaient, par endroit, des enfants de l'amour ;
il n'est plus, en ce lieu, que l'odeur de la haine,
il n'est plus que la mort, ses ruines alentours.

Quel est donc cet endroit ? C'est Ici, c'est Ailleurs !
« Dans le frais cresson bleu, le soldat fait un somme* »
Les enfants qui dormaient, hurlent de ces frayeurs
que distribuent, partout et gratuitement, l'Homme !

Alors, d'un geste grave, instinctif et meurtri,
blessé de cette mort qui partout nous pourchasse,
éclaboussé de sang . En mon âme les cris,
les souffrances, les plaies. Moi, j'ai tiré la chasse !

 

 

L'on ne dit pas...

L'on ne dit pas « je veux », l'on dit « si c'est possible"... 
S'arrête, en son histoire, l'homme d'autres jours,
lui qui se crut si haut, aux cimes invincibles
dont la vie dessina, en ses cieux, les toujours.

L'encrier des maudits s'évide sans partage,
l'on ne dit pas « je sais », l'on dit « il se peut bien »
et la plume est ainsi au soudain de sa cage
sans encre ni couleur pour des mots de plus rien !

Parmi les floraisons des verves saltimbanques,
l'on ne dit pas « j'écris », l'on dit « je vous raconte »,
la plume trouvera tous les mots qui vous manquent,
fusse l'esprit ailleurs en de bien d'autres contes !

Là, sur la sépulture, égrainée de soleil
où l'ombre des non-dits brûle au feu des douleurs
l'on ne dit pas « je prie », l'on dit « je me réveille »
lorsque l'on a dormi au fin fond de ses pleurs.

Et la brûlure étrange, aux yeux fermés trop tôt,
louvoie des mots de rien sur des écrans défaits,
l'on ne dit pas « je viens », l'on dit « c'est un peu tôt »
ainsi que l'horizon mélange ses effets.

Au singulier partage entre l'homme et son frère
l'on ne dit pas « bonjour », l'on dit « je vais là-bas »,
les routes dévouées sont parfois arbitraires
quand chacun garde en lui les mots de ses « tout bas » !


 

N'importe où sur la terre

Un homme se terrait sous l'escalier d'un pont,
replié sur lui-même et les marches glaciales,
les yeux à demi clos et les rides au front
semées de ses douleurs profondes et bestiales.

Il n'était pas cinq heure et la ville à l'écart
bruissait de tous ses feux et de ses dévolus
jetés sur l'ignorance et les fonds de placards
où chacun rangera son petit gré de plus.

Lentement s'estompaient les marches une à une
au bon vouloir de l'heure et de ses prévoyances,
et ce serait bientôt cette chose commune
en finir des douleurs et de toute ignorance.

A quelques pas le fleuve, en ses noirs clapotis,
reflétait les lumières de l'extravagance
dont la ville, à côté, comme des graffitis,
projetait, ça et là, toute l'inélégance.

Quand il ouvrit, dans l'eau, le trou de ses mystères,
l'homme ne savait pas qu'éclabousser le monde
de quelques gouttes d'eau, n'importe où sur la terre,
n'entacherait jamais l'indifférence immonde !

 

Le temps

Le temps vieilli bien plus que nous,
voyez tout ce qu'il ne dénoue
parmi ces labeurs insidieux,
le temps qui se prendrait pour Dieu !

Futile, futile son âge,
et le lointain de son voyage,
le temps de le nommer il fuit
et chacun se presse et le suit !

Il est fier, il est éprouvant
mais il ne sème que du vent ;
le temps est une vieille ordure
ainsi qu'en nous plus rien ne dure.

Je l'ai croisé, l'autre matin,
songeant à bien d'autres lointains
il nous devance, nous confond,
le temps est autrement profond !

Il engloutit, il démesure,
allume l'aube, éteint l'azur,
le temps se prend pour plus que tout,
il est ici, il est partout !

Ignorons-le juste un instant
s'il nous en offre encor le temps,
lui qui nous voit de son balcon
et nous prend vraiment pour des cons !

 

°°°°°°°°°°°

 

Je n'écrirai pas ce soir
Le ciel est bas
L'heure est tardive,

Je n'ai ni peine, ni espoir
Il pleut là-bas
Et je dérive.

Il pleut, tu vois,
Mais j'ai mon ciel à découvert,
Du bout du doigt
Tu ajouteras la lumière,

Juste un soleil
Oh, pas l'été,
L'eau et le miel
La clarté.

Toi c'est l'orage
Qui s'étiole
Un jeu à l'âge
Qui s'affole ;

Tu es ... nulle part,
Je suis partout
Et le brouillard
n'est pas si doux,

ni grand l'espoir
s'il pleut là-bas
où je dérive

car je n'écrirai pas ce soir
le ciel est bas
l'heure est tardive.


Les Mots du coeur

Il avait sous ses yeux laissé passer le temps
- mais à tout regarder il faut bien du courage -
par la moindre notion, là, pour le moindre instant
quant aux mots de son coeur il ne savait son âge ;

Cela faisait des lieux et des lieux de voyage
où jamais cadencé, son pas, à tous les vents
l'avait conduit, ici, ce jour, sur cette page
à déposer les mots de son coeur plus avant ;

Pour quelqu'autre horizon il eut tourné la tête
si toutefois le ciel évidait les nuages
dont on a, ça et là, d'ombre un peu plus discrète,
éteint les mots du coeur à de certains ombrages ;

Il avait sous ses yeux laissé passer le temps,
bien que n'ayant pas su tout bonheur, toute rage
et lorsqu'il y songeait, quelquefois, là, pourtant
des mots du coeur venaient refléter son image.




Le sac empli de mots

Quand le soir s'en viendra sur cette route immense
où nous aurons marché et puis mon ombre et moi,
laissant en nos pensées voyager les romances
dont la vie, en ses grés, éveille les émois ;

quand ainsi la lumière paisible du sombre,
lentement glissera sur ce chemin songeur,
nous ne ferons plus qu'un et puis moi et mon ombre,
un seul être en sa nuit, et le seul voyageur.

Nous poserons, par-là, en quelque sente obscure,
le sac empli de mots que nous n'aurons écrits,
allongés au silence de nos sinécures
et les yeux vers le ciel nous oublierons nos cris.

Il pleut sous d'autres cieux, et d'autres plaies réveillent
des hommes en devoir de vivre simplement,
nous deux, mon ombre et moi, garderons le sommeil
que ne trouvent, ceux-là, dont, partout, la vie ment.

Si le matin revient et nous dessine encor,
reprenant notre sac empli de mots lointains,
sur cette route immense, et mon ombre et mon corps
avanceront d'un pas vers quelque autre destin.


Aux Hommes

Le monde regardait du plus haut de ses songes
Des hommes démunis, dans la vie, encombrés ;
Le monde murmurait  -  parmi tous ses mensonges -
S'inquiétant du prochain, là, qui allait tomber.

Et d'aucun ne voyait ce qu'il eut fallu faire,
- A tant s'interroger l'on ne réagit -
Et plus le temps passait sur les bords de la terre
Plus les hommes mouraient ou de faim ou de froid.

Il y eut le silence, les regards détournés
Et tant d'échappatoir's, tant de fausses questions
Que plus aucun d'entre eux ne savait que donner,
Si ce n'est seulement sa propre démission ;

Et le monde baissait les bras devant l'urgence,
L'on ne regardait plus les hommes dans les yeux ;
Quelques fous, dans tout ça, s'éprirent de vengeance
Contre ceux-là pour qui la vie valait le jeu.

Ainsi s'entremêlaient des rages, des souffrances
Sur la terre imbibée de plaies pestilentielles,
De Cuba à Tokyo en passant par la France
L'humanité entière avait éteint le ciel.

Je ne sais plus très bien qu'elle était cette époque,
Quel était donc ce siècle où mouraient des enfants
De faim, de maladies, de tortur's que j'évoque
Bien qu'à y réfléchir, je dirais : .... « Maintenant ».



Meurtri, cela est vrai ! 

Et je repeins le ciel de ma plume imparfaite 
estompant, ça et là, l'ombre de mes défaites, 
je ne me résous plus aux couleurs mensongères 
dont ma vie fut fardée, ici et là, et... J'erre 

sur le tableau mouvant où meurt, à petit feu, 
le possible chemin qui n'eut de couvre-feu 
lorsque à tout deviner, j'avais cru tout comprendre 
mais... j'ai revu l'endroit où je devais me pendre ! 

C'était un autre jour, semblable à celui-ci, 
un arbre me disait : « oui, oui c'est bien ici ! » 
...Je ne me souviens plus des sanglots de l'automne, 
de ses rousses couleurs dont toujours je m'étonne ; 

j'ai laissé, à son pied, le courage de vivre 
et le chemin des jours que je ne sais plus suivre ; 
il ne reste, ici bas, que le vide surfait 
de ce que j'ai osé, de ce que j'ai défait. 

Impertinente pluie, sur mes jours acrobates, 
qui perle dans mes yeux quand mes mains se débattent 
en ces liens que, jamais, je ne voulus connaître 
et qui plongent ma vie du haut d'une fenêtre ! 

J'ai fatigué le sort de mes mésaventures, 
trop entrouvert l'endroit où bien d'autres se turent, 
et je reste, mi-clos, démuni, désavoué, 
meurtri, cela est vrai... Je ne peux qu'avouer ! 

 


Entre chien et loup.

Ce n'est qu'au soir que je m'éveille,
entre chien et loup me voilà,
cherchant au gré de l'au-delà
la lumière qui émerveille.

Au bord des toits, là-bas, s'accrochent
les teintes rousses du couchant,
l'on perçoit juste encor le chant
d'un oiseau tout en doubles-croches.

C'est l'instant du fragilement
au silence de mes regards
où mon esprit ainsi s'égare
en d'impalpables tremblements.

Je suis l'ombre du ciel en feu,
le feu de l'espoir interdit
le « dit » du « tu » de l'inédit
l'inné de tout ce qu'on ne peut.

Et s'estompe ainsi la lumière
en des langueurs inachevées,
je vais pouvoir enfin rêver
et n'entendre que mes prières.



L'école buissonnière

L'on m'a donné des Mots aux souillures blessantes,
là, sur ces bancs d'école aux déraisons absentes,
à coup de règle en bois j'apprenais tout par cœur
... le pronom relatif à quelque'endroit m'écœure ;

L'on voulait, là, m'offrir la belle connaissance,
ouvrir à mon esprit, de tous les Mots, le sens
afin qu'au gré des jours je fus un homme sûr
d'un savoir inculqué à grands coups de blessures ;

L'on n'a pas vu pourtant mon esprit voyager
chaque fois qu'un copain, là, se faisait juger
pour quelques fautes fait's à ce Français-penseur
dont l'instit orgueilleux se voulait défenseur,

et lorsqu'à regarder ma médiocre orthographe
l'on me jeta dehors d'un coup de pile ou face,
ces pauvres gens, nommés de leurs trop grands diplômes,
ignoraient, pour les Mots, l'amour qu'avait ce môme,

ce gosse qui, déjà, méconnaissant la verve,
recherchait, dans l'Ecrit, les vrais Mots ... ceux qui servent
à détrôner celui qui enseigne surtout
les esprits, là, soumis mais pas ceux qui échouent,

aussi sur mon bateau, les Mots comme grand-voile
et le ciel indigo ébouriffé d'étoiles,
je fais depuis trente ans l'école buissonnière,
écrivant Liberté à ma propre manière.



J'oublierai

Dans ma pénombre enfouis les secrets de mon cœur
s'estompent doucement et doucement s'évadent
au-delà de la vie dont j'apprenais, par chœur,
jour après jour, ainsi, que tout est feint et fade.

J'aimais ce doux regard, cette main, ce partage
lorsqu'en ce monde en feu, en des jours d'autrefois,
je rencontrais l'amour, ignorant qu'en otage
il prend le corps et l'âme et nous les rend sans foi.

Elle fut douce et belle, exquise d'un moment
dont j'avais entrevu quelques rives secrètes ;
il est au fond de moi imperceptiblement
le vouloir qui conduit l'amour en amourette.

J'aime, au bord de la vie, déposer ma tendresse,
qu'elle ne put jamais blesser, ni entrevoir
ces choses qu'on espère en sa tendre jeunesse
et qu'on veut oublier lorsque arrive le soir.

Plus rien n'entreverra mes pénombres câlines,
j'ai couché ma fiévreux en mes incognitos,
je ne veux plus savoir le nom de l'orpheline
qui, en mon cœur souillé, blottirait son veto.

J'ai meurtri, j'ai souffert, écouté des silences,
entre des draps défaits entendu l'au revoir,
ainsi dans ma pénombre en une nonchalance
j'oublierai ces amours que mon coeur a cru voir.



La mort du mot

Et dans le silence où mes cris
de plaies vives se dénaturent,
j'ai oublié, là où je prie,
ces petits jours où la nature

presque défaite des langueurs,
comme posée l'ombre au ruisseau,
éveille l'aube à des bonheurs
dont je me sens presque un peu sot ...

Chaque fois que bouge mon ombre
aux pas d'un jour inattendu
si mon regard est un peu sombre
c'est peut-être un malentendu ?

Peut-être une façon de rien,
une rime là sous ma porte
dont j'apprends le mal ou le bien
au gré des choses qu'on supporte ;

C'est peut-être qu'il se fait tard
aux insomnies de mes lacunes
et que le poète-bâtard
à ses rimes n'en trouve aucune ;

alors de silence en poussière
lorsque le vain mot s'égosille
adossé au mur - plus très fier - 
de ma plume ... je le fusille.



Ecrire par-dessus tout

De fautes d'orthographe en mots désapprouvés
il voulait de sa plume évoquer bien des choses,
autant parler d'amour que des morts retrouvés
sous les gravats des jours que parfument des roses.

Les murs, où l'on écrit à la craie des blessures,
érigés par des hommes autour des saisons,
ne manquent pas ici quand, même la censure
aurait visage humain à l'écran des raisons.

Il écrirait partout, fussent les regards froids,
et montrerait du doigt l'étrangement futile
de ces vies balafrées aux lames de ces droits
dont l'homme s'investit de leur propre inutile.

Je vous prie d'agréer mon doigt touchant les deuils
et le chant de mes mots si mal orthographiés,
je ne resterai pas le cul, là, sur mon seuil
pour de grammaticales règles à défier.

Allez, là-bas, me lire en mon fort intérieur :
http://perso.wanadoo.fr/des.mots.au.monde/
si toutefois la vie vous autorise ailleurs
à trouver en l'écrit un défit à l'immonde.




Et même par ces mots

Je n'ai rien à vous dire, il pleut sur mes désastres ...
Au plus haut que serait le plus brillant des astres
J'aimerais que mon coeur se pose silencieux ...
Oh oui là haut, là haut ... un petit coin des cieux !
.. Juste ne plus entendre et ne plus voir ces jours
Effilochés d'aigreurs à l'aigri des toujours ;
Épouser ma rimaille à l'aube du refus
d'être encor ici bas ce que je suis ou fus,
Juste un ultime cri comme à naître on entend
L'appel immaculé de l'Être qu'on attend ;
J'aimerais n'être plus que le plus grand silence,
N'avoir plus aucun mot, à ma plume, qui pense
Et me fondre aux couleurs d'un ciel en ses soupirs
Et même par ces mots ... n'avoir rien à vous dire.




L'Art est un privilège.

Et l'ouvrier grandit à l'ombre des usines
où son père insalubre aux bleus métallisés
courbe le dos sans bruit et sans bruit élimine
le mal d'être ici bas au vin des abusés.

Il franchira le seuil de la grande maison
où l'on crève à mesure du bruit des cadences,
la machine tue l'homme où l'homme a ses raisons :
« gagner sa vie ainsi que les autres la pense. »

S'il en est un qui sort du chemin assigné,
le voilà défaillant parmi d'autres cultures,
quelque part, en la vie, il eut voulu gagner
quelque lieu, quelque endroit en différents futurs.

Mais la porte est fermée, l'Art est un privilège,
il n'appartient qu'à ceux qui l'on apprit par coeur
en ces grandes écoles issues des collèges...
l'Art n'est pas dans la rue quand tant de rues écoeurent

ces hommes du savoir mutilés de leurs livres,
ceux qui tiennent les brides de la pauvreté,
qui ne sauront jamais de cet homme un peu ivre
l'exacte certitude de leur liberté,

car c'est au bout d'un fil qu'elle pendouille encore
quand « Les Pauvres » d'Hugo sortiront de nos tombes,
quand mon père ouvrier sortira de sa mort
et qu'à vos souscriptions pour arrêter les bombes

nous offrirons le poing que nous avions levé,
celui d'un même deuil, d'une même souffrance,
le poing de ces révoltes toujours réprouvées
en votre beau pays que vous nommez : la France.



à Mes Enfants.

Par-dessus le monde affranchi
Aux piètres lois du genre humain,
Par-dessus tout l'irréfléchi,
Toute l'errance, tout chemin,

Par-dessus l'or, par-dessus l'eau
Et plus haut que toutes les choses
Quoique le monde serait beau,
Que je m'en tienne à peu de choses

Quoique l'extrême ...
Je vous aime.

Par-dessus l'hiver infernal,
Ou les moiteurs du fol été,
Par-dessus le regard banal
D'un homme à l'autre, la pitié,

Par-dessus mes sens noués
Et plus fort que toute irraison,
Quoique la terre secouée,
Que je m'en fasse une raison,

Quoique l'on sème
Je vous aime.

Par-dessus les plus grands outrages
Aux hommes sans cesse infligés,
Par-dessus l'homme à l'homme en rage
Et tout ce qu'il a érigé,

Par-dessus l'aube magnifique
Des jours où la vie nous fait peur,
Quoique ma verve nostalgique,
Que je n'en sache plus les heures,

Quoique ... quand même ...
Je vous aime.

Par-dessus l'étoile irréelle
Des nuits fragiles sans façon,
Par-dessus moi qui vous appelle
Par-dessus ce qui n'a de nom,

Par-dessus, par-dessus la faille
Qui passe entre nous quelquefois,
Par-dessus tous les feux de paille
Mais ... dans la ferveur de ma foi,

Quoique j'essaime ...
Je vous aime.




Maintenant que la vie

Je m'épanche aux fenêtres vides du surfait, 
là même où regarder ne se peut, ne se fait ; 
la morale est ainsi qu'une aube négociée 
pour chaque pas de vie, chaque fois déprécié. 

Dans le blanc des pensées sont des négativismes 
mais pour trop de couleurs l'homme ne sait l'altruisme, 
alors au blanc, au noir, aux grisailles du temps 
l'on ne peint par les mots que de sombres instants. 

L'on s'érige en histoire ou d'amour, ou de haine 
tantôt la plaie ouverte, tantôt le coeur à peine, 
et lorsque défaillant d'avoir cru vivre un peu 
l'on se retient aux bords d'un étroit « ce qu'on peut, » 

nulle vie, nul amour, nulle mésexistence 
n'étouffera le bruit du cœur à la potence 
et par de-là l'eau claire aux rives interdites 
où sur le bord du fleuve aux eaux souillées des rites 


nous sommes médusés de toute l'ignorance 
et de l'autre et de soi, du semblant, des errances, 
des vouloirs parfumés de trompeuses idées 
brandies sous des drapeaux en des tissus blindés, 

nous sommes, semble t'il, des Êtres faits de chaire 
mais l'esprit pour penser trouve que tout est cher 
et l'on va son chemin ignorant les blessures 
de l'homme dit « humain » dont les mains le censurent. 

Nous sommes - le croit-on ? - maintenant que la terre, 
boule sur le billard des gestes qu'il faut taire, 
roule, roule entre l'aube et le futur absent, 
maintenant que la vie, ici bas, est en sang. 



Devine-moi

Devine-moi à l'étendue de mes froideurs 
au ciel en feu, au ciel en pluie où je n'ai d'heure, 
là où perdu 
inexistant 
au songe indu 
bien seul... J'attends, 

depuis que, morcelé de rage ou d'amertume 
comme l'étang où mon histoire n'est que brume 
devine-moi 
inhabité 
du moindre émoi 
seul, hébété ! 

Regarde où l'ombre enfouit sa propre profondeur, 
l'esprit défait, j'écris mon nom sans autre ardeur 
que balbutier 
en cet instant, 
seul, initié 
au seul : « j'attends ! » 

Et le silence, par de là toute blessure 
bien qu'à l'aimer comme un soleil, ne me rassure, 
l'esprit s'évente 
en des émois 
de mésententes... 
Devine-moi ! 

L'heure est exquise et découse auprès de rien, 
je ne sais d'elle que l'attente... tu sais bien, 
lorsque apeuré 
de mes émois 
c'est à pleurer : 
Devine-moi ! 


à MATTHIEU

Il est de froids lointains en ma mémoire écueil,
de ces choses, par-là, en l'esprit qui se glissent,
le souvenir éteint aux limites du deuil...
l'absence de mon fils.

Aux dessins des pensées, à la trop longue route,
à ce visage encor dont mon regard se plisse,
aux là-bas des pourquoi je devine, j'écoute
l'absence de mon fils.

Et j'évoquais le seuil où nous apercevoir
lorsque nous aurions fait fi chacun de nos vices
mais tous les lendemains n'ont eu qu'un au revoir...
l'absence de mon fils.

Il ira loin sa vie aux fièvres de son âge,
regardera les jours et les nuits qui bâtissent
au gré de ses vouloirs... moi je fais ce voyage
l'absence de mon fils.

Je nous voyais par-là - un pas est peu de chose -
retrouvant quelque élan, être un peu plus complices
mais tout au fond de moi, tout ici, tout dépose
l'absence de mon fils.

Et blanchissent les jours et s'éloigne l'instant,
ce lieu de n'importe où aux rires qui fleurissent...
Il ne me reste rien qu'à laisser fair' le temps
pour rencontrer mon fils.




Je t'envoie simplement

Il est partout des Mots aux fenêtres du temps 
dont l'ombre nous effleure en l'esprit et la voix, 
des Mots dansés aux ombres de quelques instants 
que le cœur entrouvert quelquefois entrevoit. 

Des Mots sur les silences des adversités, 
balbutiements d'amour en des aubes fugaces, 
des Mots comme redire ce qu'on a cité 
en quelqu' autre poème en un tout autre espace. 

Il est dans l'entre jour de nos plaies, de nos rires 
cette musique en soi de bonheurs ou de maux 
dont l'écho s'évanouit lorsqu'on cesse de lire 
et les pages, les pages qui protègent les Mots. 

Au secret de leur vie notre vie s'illumine 
que soit le texte en pleure ou la joie en son lieu, 
tout doucement l'écrit en couleurs s'achemine 
de la plume là-bas aux là-bas d'autres yeux. 

Je t'envoie la musique de Mots imprévus, 
toi qui passe là-bas en des jours d'autre envie, 
quelques vers imprécis ou presque déjà vus... 
je t'envoie simplement quelques Mots de ma vie. 

Ainsi soit-il !

Voguent au vent les feuilles mortes
et dans la brume de l'exil
toutes ces choses qui m'emportent,
ainsi soi-il !

Je reviens de loin et le jour
se prélasse en lieux volatiles...
Il est d'impossibles séjours,
ainsi soit-il !

Ne me demandez plus l'histoire,
ses galbes doux, moi malhabile,
mon pas se tait sur les trottoirs,
ainsi soit-il !

A l'autre nuit des démesures
lorsque tout bas tout est subtil,
le cœur n'est rien qu'une brisure,
ainsi soit-il !

Et par-dessus l'extravagance
de n'être que dans l'inutile,
il n'est aux choses d'arrogance,
ainsi soit-il !

Les feuilles voguent sous le vent
des riens du tout, toutes futiles,
et ce jour s'enfuit si souvent...
ainsi soit-il !




Vous... dont mes yeux brûlés.

Et puis j'évoquerai le lieu de l'entrevue
au silence où, par-là, l'homme croit s'être vu,
dans la laideur exacte de l'in solidaire,
à tous les gestes froids de tous leurs courants d'air !

Je ne me tairai plus des petites jouissances
à s'octroyer des lieux qui résonnent d'absence
pour des mots sans jamais le moindre mot de l'autre...
l'échange est un sursis, puissiez-vous le fair' vôtre !

Comme à l'ailleurs des rues où la misère exhibe
ses senteurs affamées que le mazout imbibe
chaque fois qu'un regard méconnaît son chemin
c'est, les poumons brûlés, que l'homme tend la main !

Et sur tous les écrans s'affichent vos idoles
comme des sacs à fric pour trois bouts de paroles,
vos rêves vont bon train, mais le train a sa gare,
n'aurez-vous donc jamais pour quelqu'un un regard !

Au-delà de vous-même existe t il encore
la conscience des vies dont la vie tue le corps !
Et sur les autoroutes de vos grands voyages
trouverez-vous le temps de trois mots qui soulagent

Celui-ci, Celui-là au fossé du destin
en ce monde éclairé de ce qui vous éteint
chaque fois qu'au miroir de votre volonté
votre reflet s'étale sur la Liberté !

Mais qu'avez-vous donc fait qu'ainsi les choses sont
comme si tout n'avait que vos propres façons
de permettre la vie, de l'offrir et d'y croire,
Vous... dont mes yeux brûlés ne sauraient plus vous voir !

 

Et par-là...

Et puisque vous aimez la vie
et puisque vous aimez les vers
où l'ombre est à l'inassouvi
ce que l'homme est à son envers ;

puisque de la mort à l'amour
il n'est que le pas d'un regard
et l'étroitesse des détours
où plus d'un mot toujours s'égare ;

puisqu'élipsé des mornes plaines
la Poésie fleurit quand même
au rythme des amours en haine
et de ce lieu dit où l'on aime ;

puisque fleurit n'importe quoi,
n'importe comment de partout,
et les silences des « pourquoi »
en des vers qui ne disent tout !

puisque, fatigué des mensonges,
des fioritures affamées
dont chacun farde ainsi ses songes
comme mes vers inanimés,

je vais sur les « ...peut-être bien... »
poser les yeux comme le veulent
toutes les lois de tous vos liens...
et par-là... me saouler la gueule !

 ............

S'il te plait...

J'ai vu le vent danser en tendresses épaves
sur des cœurs amoureux que l'amour même entrave
et quelque ombre aux buissons étouffer des émois...
S'il te plait... Laisse-moi !

Le temps pieusement effrite bien des choses
depuis la plaie profonde au parfum de la rose,
il n'est à négocier ce temps qui se larmoie...
S'il te plait... Laisse-moi !

Et puis, t'en souvient-il, de ma débauche extrême
à ne pas savoir dir' très simplement : « je t'aime »
t'en souvient-il encor que je ne suis pas moi...
S'il te plait... Laisse-moi !

L'hier et le demain sont des mésaventures,
leur « peut-être » est un lieu qu'ignore la nature
et je ne sais rien fair' que je ne sois en croix...
S'il te plait... Laisse-moi !

Là-bas, qui refleurit d'une lueur étrange
où je m'envolerai vers mes mots dont s'arrangent
les lumières froissées de mes moindres effrois...
S'il te plait... Laisse-moi !

...........

Eh la vie n’oublie pas !

Je ne veux plus mourir en l’ancienne prairie
où j’ai laissé mon corps un jour de transhumance
et voir certains pleurer pendant que d’autres rient …
les éclats des blessures frôlent la démence !

J’ai dérivé des lieux en errances futiles
et mon ombre élaguée parsema des chemins,
en cet homme blessé que le matin mutile
un vieux fond de secrets brûlent encor la main.

Eh la vie n’oublie pas mon rêve en ma mémoire,
les saisons s’ébahissent de clartés étranges,
je ne regarde plus ce que je voudrais voir,
aveuglé de lumière où s’endorment des anges !

Trace cet horizon rouillé de couleurs vives
en ce ciel éphémère aux nuits des négations,
endort en mon matin les brumes des qui-vive
et veille sur mon cœur grisé d’abnégation.

Je n’ai à découvrir que le pourquoi du ciel
lorsqu’il ouvre son cœur en des éclairs de feu,
dans cette immensité toucher le substantiel
équilibre où la vie ne serait plus un jeu.

Je n’ai que la prairie bordée de mes romances
mais, parmi les parfums, les insectes moqueurs,
je ne veux plus mourir un jour de transhumance
bien qu’au fond de mes yeux soient les maux de mon cœur.


Qu'elle est donc cette écoute ?

 Tu dors dans l'escalier des immeubles-poubelles,
Ton Nom c'est mon histoire là qui continue
Et tes bras clairs-semés de taches-aquarelles
C'est la mort qu'autrefois je n'ai vraiment connue; 

Tu effleures mes gestes de ton pauvre lieu
Chaque fois que ton sang perle au long de ton bras
C'est un peu de ma vie qui s'éteint dans tes yeux
Chaque fois qu'on condamne la mort qui te broie; 

L'autre plaie de la vie que chacun s'éphémère
N'a plus de place là où tu deuilles mon ombre
Tu t'appelles "ici-gît"... nul ne sait la lumière
Qui éclate ses feux à ton lieu qui t'encombre ;

 Je suis auprès de toi et je sais ta déroute,
Toute chose pourtant ne m'est possible encore
Et je me dis, pour toi, qu'elle est donc cette écoute
Qu'Ils pourraient bien t'offrir ceux qui t'ont mis à mort ?

 ........... 

A TOUS CEUX QUI MENENT UN COMBAT

 L'homme

 

L'ombre où meurt l'impossible est une déchirure
et les plus grandes paix n'essuient pas les blessures…
L'homme ne dessina jamais de vrais soleils
ainsi l'ombre à son pas, à ce point là, ne veille, 

et s'il respire encor de quelques faux-semblants
parmi les drapeaux noirs ombré des drapeaux blancs,
rien de cela ne sied à sa juste valeur,
l'homme de tout cela ne retient que ses leurres ; 

Il s'est improvisé ses façons, ses manières
ainsi que, non jamais, il ne tint la bannière
où des mots irradiés de cœurs immajuscules
devant tous ses combats, là, jamais ne reculent

 ni l'ivresse au bonheur dont il connaît les maux,
ni le moindre regard qu'il posa sur les mots,
ni les siècles soumis à d'autres répressions …
l'homme n'a retenu qu'une pauvre impression,

et le voilà lié de ses révoltes même …
haïr ou bien aimer, c'est deux fois dir' :  " je t'aime ",
et l'homme négociant sa vie aux impostures
me ressemble … et je vis aux lieux de sa nature.

 ........... 

J'accuse

Eh ! les Mots, eh ! les Mots… j'accuse
tous les regards posés ailleurs
qu'au mal de l'homme que récusent
les faux-semblants de leurs frayeurs ; 

J'accuse le passant d'un monde
où tout n'est plus que bousculade
et qui se fraye, même où succombe,
là son chemin, l'homme malade,

 malade des Mots interdits,
j'accuse les pouvoirs grisés,
ceux qui tuent les Mots inédits
avant même qu'ils soient osés ; 

J'accuse le profit perfide
dont gloussent des hommes obèses,
qui n'offrent aux Mots que le vide
de pages… que l'Homme se taise !

 J'accuse le marchand de livres
et celui qui le manipule,
de ne laisser tous les Mots vivre,
j'accuse, là, toute crapule : 

La censure n'est irraison
et le livre n'est pas un deuil,
vous ne lui offrez que prison
mais d'Autres savent bien son seuil ; 

Le ciel entrouvre d'autres lieux
où jamais vous n'aurez de place,
j'accuse l'éditeur si pieux
qu'il n'a, aux Mots, la moindre audace

 et dans la fièvre du malaise,
là même où j'écris la souffrance
j'accus' de meurtr' ceux qui taisent
les Mots des Poètes de France.

...........   

Tu deviens...

 Et dans le ciel bleuté d'oiseaux
ouvert de tes doigts qui me nomment,
aux reflets des aubes, des eaux
où je te vois... je suis un homme ;
 

Aux fragiles de tes détours,
à cette tendresse-là comme
un petit secret plein d'amour
entre nous-deux... je suis un homme ;
 

Puis les étoiles dans mes yeux
brillent de toi tout juste en somme
parce qu'à l'ombre de tes cieux
mon pas devient... celui d'un homme ;
 

Et la lumière à nos pénombres
éveille tout ce qu'on renomme...
tu poses le bonheur à l'ombre
où ma silhouette... devient homme ;

 Et lorsqu’ainsi né de tes gestes
où se laisse bercer mon âme,
lorsque je sens tout ce qu'il reste
à partager... tu deviens... Femme.

...........


desmotsaumonde@wanadoo.fr

 

 

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