Mathieu Brosseau

 

 

Mathieu Brosseau est né à Lannion dans les Côtes d’Armor le 23 décembre 1977 à 4h25 du matin. Il passe ses premières années dans cette contrée empreinte de brumes et de mystères, entre terre et mer.

Dès l’âge de douze ans, il s’adonne à l’écriture ou plus exactement à la poésie. Il se fait violence et connaît une tumultueuse adolescence entre assimilation et destruction.

De L’Aquatone (La Bartavelle éditeur, 2001) à Surfaces, journal perpétuel (Editions Caractères, 2004), une ligne se dessine, d’un souffle mystique à une parole existentielle, pour l’avènement d’un nouveau langage.

A 26 ans, Mathieu Brosseau a déjà intégré deux anthologies : Les Nouveaux poètes français et francophones et L’Anthologie des poètes contemporains de Bretagne.

Sous un éclairage original et poétique, nous pourrons aussi retrouver Mathieu Brosseau sur son site web, qui connaît un franc succès.

Aujourd’hui, ce jeune poète compose son troisième recueil, La Poètique d’Asla.

 

 

Folie nécessaire

1


Adieu
Le bateau
Sous la mer de sel
Conservons le sable.
L'amour se ferme
Sous une brume insensée,
Souffrante ;
Où je reconnais,
Explore certains objets
Sans rire rien.
La voix nouvelle
Métallique sans signifier
Est nécessaire.
Sous les dents de la belle.
pour la mort cette voix
Rend inexistant
Et le corps s'anime,
Sur son ombre s'abîme.
Cette voix sur son silence
Balance
Tes yeux comme seuls juges,
Ta voix comme seule aventure.
La balance juge tes yeux jugeant.
Tout cela dans une absence béante,
Et cette femme qui me ressemble
Me porte
Dans l'ombre.

2

Folie nécessaire
Aux naufragés du temps
Dans cet espace rien n'a fleuri
Les rides épaisses sont au désert
Et le froid conserve tes yeux.
La mort s'embellit quand tu serres la gorge et
Filtre ta voix absente.
Cette voix.
La voix du dément.

3

Elle tua ton ombre
Et toi dedans
Reniflais les vies absentes.
Une voix oblique,
Oeil Torve,
Dépasse charité,
Donnant ouvertement,
Forme d'hécatombe
Aux Réalités qui m'enchaînent.
Le seul visage du souffrant
Continue d'une voix
Et souffre cette cathédrale
Aux joyaux insondables ;
Pourtant sondés
D'un coeur qui ne cherche
Au temps
Que les coïncidences
Miraculeuses.
Sans soumission,
L'aigle pèse le ciel
Au décor d'anté-femme.
Cette coque de fer.
La voix comprend et Elle te liera à Elle.
Avec vous, des oeufs allongés sur les siècles.
Elle rit et t'emmène au temple.
Ton temps emmêlé prend la forme de mon corps.
Cette éternité jouait de la musique dans ta voix.

Extraits de L’Aquatone
La Bartavelle Editeur, 2001

 

 

 

" La poésie est fille de l’esprit. Elle donne à penser. Sourdement. Sa secrète offrande, dans les marges et les décalages qu’ouvre la langue, c’est ce que toute philosophie peine à dire : le temps, le langage et le monde. Elle met en musique le douloureux mouvement de l’être au langage, l’empreinte écartelée du soi dans le monde et le temps. Quelques sons s’entrechoquent, “ mélodie qu’on tâche d’harmoniser avant de s’extraire du labyrinthe, ” et dessinent une pensée. Roulement de tambour, grincement, cascade irisée de sons transparents, chaque texte de Mathieu Brosseau restitue cette aventure intérieure sans issue et parfois sans retour. Apparaît alors, dans l’éclair d’un moment de stabilité, un poème, une trace à la surface. "
Alexis Masse

 

 

La structure de l’harmonie


Pour moi seul, la structure de l’harmonie
découle de l’angoisse
née du principe séparateur.

Et pour l’autre, la part imposée,
elle s’articule
autour des objets et des mesures.

Je me vis, je te vis,
l’un et l’autre je suis
et tout est plan au centre du cercle.

La douceur après l’agonie.
Je me contenterais de toi, de moi,
dans le noir profond de notre séparation mesurée.



Surfaces, journal perpétuel
Editions Caractères, 2004

 

" Quelle place la poésie occupe-t-elle aujourd’hui dans nos vies ? Il semblerait que la prose l’emporte à bien des égards. Il n’y a qu’à voir le nombre de romans et de nouvelles publiés chaque année. A côté, les vers font grise mine. Et pourtant...Il est des recueils qui nous rappellent que la poésie fait partie de l’essence de l’Homme. Surfaces, Journal pérpétuel, dernier recueil de Mathieu Brosseau est de ceux-là.

L’expérience poétique de la transfiguration du réel...Le langage comme expression la plus haute de la pensée...S’il s’agit d’un Journal, c’est bien parce que le point de départ de cette écriture est l’expérience du quotidien...Expérience d’un homme parfois en proie à des démons intérieurs féroces Au réveil je m’aperçois qu’un nouvel habitant déambule / Dans ma tête. Mais cette expérience, loin de s’individualiser, tend au contraire à s’universaliser. La puissance du verbe permet d’étendre l’expérience dans un espace-temps qui ne connaît plus de limites, un espace-temps perpétuel. C’est en cela que la poésie de Mathieu Brosseau nous touche. Elle parvient à traduire les signes de l’expérience en signes éternels, dans le monde des Idées. Le poète est le traducteur de hiéroglyphes présents en chacun de nous.

Le poète se place en dehors du monde parce que, par la puissance du verbe, du verbe tactile, il invente un nouveau langage. L’extraordinaire de l’entreprise est que jamais cette langue nouvelle n’exclut le lecteur. Elle l’intègre, avec lui, hors du monde, dans d’autres sphères, et le monde s’abstrait.

Nous retrouvons ici des figures de L’Aquatone, premier recueil de Mathieu Brosseau mais la langue poétique de ce jeune auteur s’épure, le rythme s’affirme, cette rythmique temporelle omniprésente, obsédante. Surfaces, Journal perpétuel est le deuxième volet d’un triptyque qui s’achèvera avec Les Aériennes. L’entreprise poétique de Mathieu Brosseau dessine un mouvement évidemment ascendant parce que la Poésie, si elle parcourt les fonds aquatiques et secrets de chacun, n’en est pas moins destinée à l’éther des cieux. C’est à la surface que s’articulent, de manière parfois presque indicible mais jamais inaudible, des mondes qui n’en forment qu’un. "

Gabrielle Napoli

 

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