LYNE C.

 

 



Jeudi soir

Le ciel est si gris et si bas aujourd’hui,
Même le silence se perd dans l’ennui.

Certains me regardent. Mais ne me voient pas.
Un sourire, une phrase, d’une étrange voix.

Seule, assise là, au milieu d’une vie,
Des bruits de pas, ici ou là, qui s’enfuient…
Les minutes s’effacent au gré du hasard :
Quelques heures de plus… il sera bien tard.

Les pas emplissent le vide, avec ou sans moi.
Ils s’en vont et viennent, sans aucun émoi.
Mon cœur lui aussi, souffre de peurs austères,
Mais il ne dit mot, elles lui sont familières…

A ces nombreux pas, qui bien trop résonnent,
Et qui, bien que trop, jamais rien ne donnent.
Une pause là. Plus léger ici : pour personne…
Un faux brouhaha, aux couleurs d’automne.

Le ciel est si gris et si bas aujourd’hui,
Qu'il serait évident de mourir d’envies !
Personne ne regarde. Et qui pourrait voir…
La détresse d’une femme, pendue à l’espoir. 


Les cris de l'âme

De dédalle en détail, 
le triste se dessine
Chaque mot se taille, 
d'espérance assassine !

Le silence me guette,
Il fait brunir mon cour
qui, peu à peu, s'arrête
de chercher un bonheur.

Une petite plaie -si aride-
tout d'abord, invisible,
s'agrandit, ride à ride,
Mais, qui en est sensible ?

Le corps s'habitue à n'être caressé,
mais c'est l'âme, esseulée, qui s'abîme.
La vie, étouffée de ses rêves cassés,
s'accroche insipide, à cette abîme.

De jours en nuits sans tendresse,
Les sourires sont pâles aux chemins.
les souffrances se plient en détresse
Il pleut, aux rives des lendemains.

28/05/04


Bien sûr

Bien sûr, c’était la même allée de sapins bleus
Qu’il voyait de sa fenêtre, les jours d’été.
L’ombre venait se reposer sur ses volets,
Et la nuit voilait peu à peu son ciel frileux.

Bien sûr, tous les deux, nous allions sur ces pavés,
Parfois côte à côte, à sourire aux merveilles
Devinées au travers de ces gens délavés, 
Couchés ça et là, les yeux poudrés de soleil.

Bien sûr, nous savions nos passés et ses oublis,
Ces visages figés de nos heures d’autrefois
Qui avaient su, un jour, faire noircir la vie.
Mais au jeu des couleurs nous conservions la foi.

Bien sûr c’était ce même adorable jardin
Que j’observais, en imaginant un monde
Réveillait de bonté aux fronts des citadins ;
Tandis qu’il brandissait ses mots à la ronde !

Bien sûr, nous prenions peu à peu nos habitudes
Conjuguant l’amitié aux reflets doux-amers
sur les ailes du temps, le cœur prend des manières : 
« L’enfer est tout entier dans ce mot : Solitude »*
* Victor Hugo


 

Il faut croire


Promesse-caresse gardée en éprouvette,
Pensée précieuse en un coin de ma tête.


Croyance-patience germé en alternance,
Bouton d’espoir en pousse d’espérance.


Sourire-désir fleuri aux saisons de bonheur,
Lumière de douceur aux rives de mon cœur.


Regard-espoir posé aux bords de ces demains,
Dons de nos songes bercés aux creux de nos mains.


Savoir-vouloir aux détours de nos doutes,
Amitié tissée à l’ombre des déroutes.

Chemin-divin tracé, bordé de nos échanges,
Suivi entre combat et joie, sans mélange.


Maux-échos déchirés, apeurant nos douleurs,
Musiques qui se mêlent, pour effacer nos leurres. 


Naître-renaître, contre notre passé,
Nous regarder passer et mieux nous retrouver.


Ici-ailleurs, voyageurs solitaires,
Nous savons côte à côte, notre îlot de terre.



Je marche dans la rue ce matin,
Une musique flotte dans l'air :
Elle crie le doute et le chagrin
Et l'espoir qui se fait amer.
Pourtant il y a dans quelques notes
Une légèreté, une espérance,
Qui malgré elles les emportent
Comme une singulière errance.
Et le guitariste de chanter,
De déchaîner ce qui le bride.
Et le musicien de murmurer,
Que son cour ne prendra de rides.

Je marche dans la rue ce matin,
Une musique flotte dans l'air :
Je ne passerai pas mon chemin,
J'écouterai à défaut de me taire !



Dans cette vie sans nom 
Cette fuite à l'oubli 
Nous berce d'illusions. 

Qui saura la raison 
Le pourquoi des non-dits 
Qui brouille les passions ? 

Dans ce monde à canons 
Qui tue même l'esprit 
L'écrit n'est qu'allusion. 

Cueille l'herbe aux vallons 
Pour que le peintre rie 
Aux couleurs d'émotion. 

Vole le ciel aux saisons 
Pour que l'enfant sourie 
aux chemins d'éclosion. 

Prend la rime au pardon 
Pour l'homme qui écrit 
A l'imagination. 

C'est l'offrande ou le don 
A nos mots qui s'oublient 
Dans leurs cœurs déraisons. 

Nous ne sommes que des sons 
Des rêveurs d'aujourd'hui 
Pris dans leurs alluvions ! 

Nos mots ici mourront 
Aux sanglots d'infamie 
Sans autre confession...


 

Etat Dame

Silence… silence qui lentement s’élance,
Silence… réticence, avec tant de violence,
Qui vient, comme une lance, percer mon cœur,
Qui le prend, le balance, et qui m’écœure.

Patience… patience, qui joue l’indulgence,
Patience… endurance, qui grime l’évidence,
Qui trompe mon esprit, qui frôle la folie.
Qu’aucun bruit de pas n’éveille l’oubli.

Défiance… défiance, qui chaque jour avance,
Défiance… méfiance, qui germe telle semence,
Qui grandit, dans mon cœur, fleur de douleur,
Qui fane, qui flétrie, mais qui jamais ne meurt.

Absence… absence, comme une errance,
Absence… défaillance, plus fort qu’une présence,
Qui envahit, mon âme, sans aucune douceur,
Qui la brise à tout jour, pour mon plus grand malheur.

 

Nuitée

La fatigue dessine,
En ombres à mes cils,
Des pas de ballerines
Aux empreintes dociles.

Deux heures du matin,
La symphonie chagrine
s’envole du clavecin
Que mes pensées devinent.

Et dans ce noir violine,
Où mon âme est diaphane,
La douleur est mutine
Et jour à être … femme !

La tristesse s’anime
Là, en doute à mon cœur,
Des perles d’eau saline
Au parfum de rancœur.

Souvenirs, à tir d'elle...

Une rose sur un bureau,
Tout près une vieille photo
Et du papier jauni
Par les heures de la vie.

Une main effleure doucement
L'image passée d'antan,
Et semble vouloir animer
Le paysage figé.

Le ciel s'est assombri,
De gris sanglots de pluie…
Qui glissent sur le papier
Recréant le passé…

C'était un jour de juin
Dans une forêt de pins.
Ils marchaient tous les deux,
Ils se croyaient heureux.

C'était en plein hiver
Quand éclata la guerre.
Les bombes explosaient
Deux cœurs se déchiraient.

Comme la belle rose
Elle avait l'air morose,
Le canon chaque instant
Résonnait interminablement !

Soudain elle poussa un cri !
Au loin une détonation de fusil…
Les pétales de roses tombèrent…
sur la tombe d'un cimetière.

Les yeux fermés,
Elle se souvenait.
C'était il y a longtemps
Elle était presque enfant.

Aujourd'hui une rose est sur le bureau,
A côté reposent la veille photo
Et le papier jauni…
Elle ne peut oublier ce cri.

Les peines ombres

La chaleur avait tout engourdi
Et les mouvements exquis
Semblaient même endormis,
A l’invisible de la nuit.

Quelques pas de graviers,
Silences aux pavés,
Ne pouvaient s’obliger
A ne pas se croiser.

Mais l’orange en quartier
De la lune voilée
Nous suivait, nous suivait…
De tout ce qui flottait.

Et l’ombre et la clarté
Et le doute et l’osé
Là, au bout du sentier
Semblaient nous oublier.

Des mots en pointillés,
Quelques regards sucrés,
Paillettes colorées,
Semblaient presque brûler.

Le ciel s’assombrissait.
Mais comment deviner,
Là, au bout des nuitées
Qu’il devenait violet…

Mais au bord du chemin,
Au détour d’un chagrin,
Au petit pas de mains…
Certain et incertain

Ne savait que frôler
Tout ce qu’il contenait,
Dans un bord de pensée
Qui s’offrit de flotter.

C’est enfin libéré
De ces chaleurs d’été
Que le ciel consentait,
Enfin, là, à donner

A nos cœur qui battaient,
L’ondée bleue apaisées,
Qui tombait… -volupté-
En étreintes frôlées.


Voyage

C’était un beau voyage
Aux souliers de mes trêves.
Apprendre à faire le mur,
Là, au coin de mes rides.

C’était un beau voyage
Aux couleurs de mes rêves.
Chanter dans les ramures,
aux détours de mes mots.

C’était un beau voyage
Aux pas à pas des lèvres.
J’ai la peur en pâture,
Pendue au cou du ciel.

Ce fût un beau voyage
Aux heures qui s’achèvent.
Effacer les ratures,
Aux souvenirs des peines.

 

Lie Cœur

Il est parfois des petits jours
qui viennent à chaque détour.
C’est un silence ou une voix,
Un regard frôlant tout bas.
Et lorsque enfin mes yeux s’endorment,
La tiédeur du matin s’étonne…
Douce prunelle pleure et rie
Au gré de la lie de ma vie…

 

Doigtés

Un jour j’avais froid
J’ai frotté mes doigts,
Sans savoir pourquoi,
Au cœur de mon bois
Où le feu, je crois
Sommeillait tout bas.
Et là, croyez-moi
Tels des plumes-doigts
Couleur de sépia,
Sont sortis de moi,
Tels des vers à soi
Des mots, des émois.
Je les voyais là
Regrettant déjà
D’être devant moi,
Ayant mis des mois
A s’offrir le droit,
De poser leur croix.
J’aurais eu le choix
de garder pour moi,
Ce chant de hautbois,
Qui résonne et croie
Que le bon aloi
Est vivre ici-bas.
Même s’ils se noient,
S’ils pleurent, se ploient,
Ils trouvent leur voie,
Dans un simple éclat :
Entre vous et moi…
Le choix d’être soi !
Souvent teints de joie
ou noircis d’effroi,
Murmurant leur foi
D’une encre de voix,
A l’œil et au doigt…
Où l’Amour est roi !


Vapeurs

Une page blanche, un jour d’été,
Dans le silence, l’encre crissait…

Les yeux au vague, lacs bleutés,
Laissent voguer aux jours salés,
Des idées suaves, des mots voilés…
Ineffable charme feutré.
Dentelles et macramés,
Perles mises en collier,
Parfum frais et sucré….
Douces et tendres pensées,
Portées par un vent trop léger,
Viennent, timides, t’effleurer,
Brises de lointains baisers.

 



Clair Obscur

Il fait si chaud ce soir,
Le soleil brûle ma mémoire,
Les nuages, en ostensoirs,
Encensent le ciel : leur dortoir.
Tout est presque calme apaisant,
Le gris bleu des récents tourments,
Colore, habille lentement
luminosité et néant.
Un timide jour lénifiant,
Se dépose sur mes yeux brûlants.
Paupières fermées, résignées,
L’obscurité s’est installée…
La nuit maintenant, pas à pas,
Assombrit, mes derniers éclats
De ces heures, de fausses lueurs,
De ce jour, sans aucun contour,
De ce temps, vaillant, espérant.
Juste, ce clair-obscur de l’une…

 

Sans mot

La mélancolie fière
M’avait cerné le cœur,
De petits mots amers
qui battaient à mon heure.

Et si autour de moi
Ils parlaient d’homme à homme,
Seule, en mon désarroi,
Ils m’ignoraient en somme.

Jour après jour, inquiète,
J’avais de peu de mots
Abandonné ma quête
Aux silences des sots.

Et si j’écris ici,
Je n’écris pour personne.
Pas de bruit, pas de cri
A la page, ne sonne.

Vaine monotonie
semblant cerner les heures
De pénibles oublis,
Sans haine ni rancœur.

 

Moi j’écoute

Je marche dans la rue ce matin,
Une musique flotte dans l’air :
Elle crie le doute et le chagrin
Et l’espoir qui se fait amer.
Pourtant il y a dans quelques notes
Une légèreté, une espérance,
Qui malgré elles les emportent
Comme une singulière errance…
Et le guitariste de chanter,
De déchaîner ce qui le bride.
Et le musicien de murmurer,
Que son cœur ne prendra de rides…

Je marche dans la rue ce matin,
Une musique flotte dans l’air :
Je ne passerai pas mon chemin,
J’écouterai à défaut de me taire !



Attrape cœur

 

                          L’amour, amertume perfide,
                          Couche au lit du mensonge
A l’ombre des serments
Et nous vole nos songes.

Il se saoule d’envies
Et vomit des promesses,
Il salit les pudeurs
Fait les espoirs faiblesses.

Aux petits jours des lieux,
Sans trop savoir pourquoi
Quelques uns se délectent
Aux pleurs de nos effrois.

Or l’amour bat au cœur
A rompre chaque instant.
Il fait vibrer tout être
Qui coure vers ses tourments.

Le sourire est si tendre
Et les baisers si doux,
A ce jeu -trahison-
Les joueurs seront fous.

Au plus profond de soi,
Croyant vaincre ses peurs,
On se met en danger
Pour détourner ses leurres.

Aux pas à pas des pleurs,
Le sournois fait sa place
Se rie de vos erreurs
Et puis, un jour, s’efface…

Il vous laisse brisée,
A la douleur sans nom,
Vous accuse, vous blesse.
Puis ferme la prison.

 

 

 


 

 

Voie Lactée


Assise sur un banc, au détour d’un chemin,
Vous souriez au vent de ce lieu citadin.
Un brouhaha têtu envahit votre spleen,
De rires en éclats, à ce vélo qui couine.
Les yeux levés au ciel, vous comptez les nuages,
Qui semblent, blancs vêtus, faire un pèlerinage…
Où peuvent-ils aller ? Que peuvent-ils bien voir ?
Ils survolent nos vies, nos pleurs et nos espoirs.
Combien de fois, déjà, vous leurs avez parlés,
Devinant en leurs places, l'animal ailé.
Ils sont gris, bleus ouatés, orangés à l’aurore
Ils s’enfuient ou trottinent, s’éforment encore.
Vous êtes enveloppée de douceur ouatée,
Comme en apesanteur… volée, bercée, portée…
Le temps n’a plus d’espace… et les bruits font silence…
Tout semble enfin léger, plus de peurs, plus d’absence.

Assise sur ce banc, au détour d’un chemin,
Les yeux pourprés brûlant de ces mirages vains,
Les heures, les passants ont envahi l’endroit,
De murmures en pas, à ces éclats de voix.
Le visage blêmi d'une sourde douleur :
Vous l’imaginez là. Mais seul est votre cœur.

 

 

Samir et Johnny

Neuf heures ce matin. Le ciel américain
De nuages souillés, offre à ses lendemains,
Des reflets éperdus, des parcours incertains,
A ces atterrés vides aux creux de leurs mains.

La terre, le soleil et l’eau, qui sont la vie
Inexorablement à ces vertes prairies,
Ne savent plus les seuils, que l’homme a seul écrits
Et font la lumière ombre aux raisons des survies.

Ces livres et cahiers, sont là, éparpillés…
Une chambre ombragée, de cet autre côté.
La musique en sourdine… et l’enfer à pleuré,
De ces larmes, ces cris : ses douleurs à jamais !

Ne lui demandez pas où se posent ses mains…
Il ne sait plus ici où s’en vont ses chemins
Qu’ils prenaient, tous les deux, dans les petits matins
Quand ils riaient au jour, de leurs deux cœurs humains.

Il s’appelait Johnny. Était américain.
Il s’appelle Samir. Et il est iranien.
Il avait un ami... Ne lui demandez rien.
Tous deux étaient frères, non de sang mais de liens.

 

Pouvez-vous un jour me dire
Quel bruit fait le silence ?
Savez-vous le définir ?
Il est pourtant si immense !

Pouvez-vous me révéler
Le parfum d’indifférence ?
Savez-vous le respirer,
Il est pourtant indécence !

Pouvez-vous me décider
A ignorer la souffrance ?
Savez-vous la regarder ?
Elle est pourtant si intense !

Pouvez-vous, là, m’écouter
Pour débrider la méfiance ?

Savez-vous la remplacer ?
Elle est pourtant tolérance !

Pouvez-vous me consoler
Pour apaiser ma défiance ?
Savez-vous la pardonner ?
Elle est pourtant innocence !

Pouvez-vous d’un mot m’offrir
Comment trouver la présence ?
Savez-vous comment l’écrire ?
Elle est pourtant ignorance !

Pouvez-vous me révéler
Comment trouver la patience ?
Savez-vous l’apprivoiser ?
Elle est pourtant insistance !

Pouvez-vous me persuader
Qu’enfin notre monde avance ?
Savez-vous mieux l’écouter ?

Il est pourtant notre chance !

 

Lyne C.

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