l'Esprit

 

 

MON NOM EST LE TONNERRE

Je suis ce que le monde a pu créer de pire
Depuis que la Joconde a perdu son sourire
Je règne sur le jour comme sur les nuits noires
Je signe les contours de tous les désespoirs

Le jour où je suis né c’est ouvert une porte
Qui cachait par sa clé ce que la haine apporte
Par delà frontière et aussi océan
Je sème la misère et glisse le néant

Je suis ce que le monde a engendré de pire
Depuis la mort abonde et j’ôte les sourires
J’abreuve mes soupirs aux fleuves sanguinaires
Je strie l’avenir de flammes nucléaires

Depuis longtemps je vis par le sang et le feu
J’aime le sang bouillis les massacres juteux
Rien ne m’arrêtera même le parricide
En moi coule le froid d’idoles fratricides

Je suis ce que le monde avait rêvé de pire
Et danse ma ronde qui tue les sourires
Je graverai la chair jusqu'à mon dernier somme
Mon nom est le tonnerre et mon prénom c’est « l’homme »

20/11/2003

 

 

 

 

VOLUTE DE CIGARE

Je n'aurai plus d'été
Ni automne ou hiver
Car je vais vous quitter
Tel vague dans la mer

Épuisé par le vent
Qui tourmente mon âme
Élimé par le temps
Qui égoutte mes larmes

Je n'aurai plus d'été
Ni même de printemps
Car je vais vous quitter
Telle rose fanant

Harassé des soucis
Qui abîment les jours
Cour gravé dans ses plis
Des mauvais carrefours

Je n'aurai plus d'été
N'en ai pas de regrets
Car je vais vous quitter
Tel chanson qui déplait

Illusions disparues
Je m'éclipse aux regards
Tout au bout de ma rue
En ultime départ

Je n'aurai plus d'été
Ni bonheur qui s'égare
Ma vie aura été
Volute de cigare

23/09/2003




MOTS D'AMOUR

Quand je t'effleure de mes mots
d'un mot caresse ou arabesque
et qu'au fond de tes yeux, éclot
ton amour fou et romanesque

Quand cette flamme à demi-mot
brûle déjà tous mes remparts
et que tes lèvres sans repos
percent mes chairs de part en part

Alors le monde peut crouler
s'évanouir, se disperser
je n'ai plus qu'un seul devenir
entrer en toi et y mourir

28/12/2002




Tu seras plus que Reine

Tu seras plus que Reine à l'orbe de mes yeux,
Quand le doigt de mon cœur écartera le voile
Qui vêt d'un soupir flou le velouté pâle
De tes lèvres si proches, douces comme un aveu.

Tu seras plus que Reine et je serai fer blanc ,
Trempé au feu pur des silences de ta peau ;
Ce vol inassouvi qui soulève nos flancs,
Des cœurs tombés du nid, qui se croyaient oiseaux ...

Courez, courez mes mains, sur le grain de la nuit !
Pincez les cordes sombres, que crie sa plainte l'ombre !
Pleurez, ô notes tendres, au cristal de la vie !

Mon souffle sur ton souffle enlacera ta peine.
Les aiguilles de l'aube piqueront les nuages,
Ourlant de rose tendre ces amants de passage ;
D'un royaume perdu, tu seras plus que Reine.

Tu sera plus que Reine, mon désir exilé
Affrontera le rêve des rives de Sabbat,
Se jouant des récifs que la vie a semés
Dans le port de l'amour où s'échoueront nos pas.

Dans le sable du temps, un trésor inouï :
Les clefs de ton royaume, un cri d'amour enfoui !

2003

 


SOUS JUILLET

Les plaines sont fumantes
Et trouble sous juillet
Dont le soleil enfante
Bien des rêves en bouquets

Aux cris fous des cigales
Exprimant leur amour
Répond l’ombre estivale
Par des chuchotis lourds

Le paysage est mort
Dès la fin des pénombres
Mais grouille sans remord
Dans chaque recoin sombre

Là, en dessous des pins
Tout un monde s’agite
À côté des chemins
Où le soleil crépite

Les plaines sont brûlantes
Et tremblent sous juillet
Écoutez-les qui chantent
Et dansent sous juillet

23/06/2003





UNE PLUIE TOMBE

 

Une pluie tombe arythmique

 

À petit « clip »

À petit « clop »

 

Sur le damier de carreaux sales

Traçant de sinueux chemins

À la face du soleil pâle

De cette journée d’airain

 

Elle sème en sons hypnotiques

 

À petit « clip »

À petit « clop »

 

Des larmes grises et pansues

Cassant net, corolles, pistils

De fleurs blanches trop ingénues

Pour se cacher face au péril

 

La pluie s’éclate sur le sol

 

À petit « clip »

À petit « clop »

 

En gerbes folles dans les flaques

Et y dessine concentriques

Des petits ronds sui se détraquent

Dans leurs rencontres hystériques

 

Tel xylophone démentiel

 

À petit « clip »

À petit « clop »

 

La pluie chantonne pour le ciel

En notes graves, notes claires

Et dans ses rus pleins d’arcs-en-ciel

Parle déjà de ses rivières

 

À petit « clip »

À petit « clop »

 

18/06/2003

 

 

 

 

MES RUELLES VIDES

J’erre aux ruelles vide de ma vie
À cloche-pied frappant leurs portes closes
Devant des façades grises moroses
Où se dessèchent toutes mes envies

Seul le son de mes pas répond au froid
Qui fige aux visages bleus les sourires
Comme un tempo dans ce destin vampire
Qui m’a tiré dans cet espace étroit

À chaque seconde à chaque minute
S’égouttent mes vides en solitude
Et mon âme pleure son hébétude
D’avoir perdu chacune de ses luttes

Tel un aveugle je marche trébuche
Crispé aux pavés moites de mes peurs
Guettant une sortie, une lueur
Mais ne trouvant que pièges et embûches

Ces ruelles sombres et cancéreuses
Sont dans chaque battement de mes yeux
Glissant dessus leurs voiles ténébreux
Y déposant des aubes nauséeuses

26/05/2003

 

 

 



OÙ SONT PARTIS MES RÊVES D’ANTAN ?

Où sont partis mes rêves d’antan ?
Ceux d’amour, ceux de rage ou de vent
Lassitude sur plages mièvres
Où seul mes pas tracent ma fièvre

Puis toujours, cette vie noyade
Telle une sinistre mascarade
Épitaphe d’égarements
Sur des chemins aux sables mouvants

Où sont partis mes rêves d’antan ?
Ceux de bonheur, de gloire ou d’enfant
Dans l’hébétude à chaque matin
Du creux des draps où meurt le chagrin

La souffrance de chaque soupir
L’esprit vide de tout devenir
Et le temps qui en long goutte-à-goutte
Trace sur mes pommettes ses routes

Où sont partis mes rêves d’antan ?
Ceux d’espoir, ceux de joie ou d’amant
Reste solitude aux yeux, rancœurs
Sur les landes vides de mon cœur

Ni pourquoi, ni comment ou raison
Seul le goût d’amères oraisons
Puis sur le front gît l’estafilade
Des amertumes en accolades

Où sont partis mes rêves d’antan ?
Dans le ciel, ou la terre ou l’étang
Vers lequel je m’en vais étouffer
Ce cœur qui n’arrête de pleurer

09/05/2003

 

 

 

 

 

MARCHER VERS CET AILLEURS DISTANT

 

Ce soir, je m’en vais sur la route

J’y vais sans qu’une larme goutte

Le pas sûr, mais cœur bourdonnant

Marcher vers cet ailleurs distant

 

Je pars comme d’autres s’oublient

Trop distraits pour vivre leurs vies

Moi, c’est pour, cheveux dans le vent

Marcher vers cet ailleurs distant

 

Et qu’importe, qu’il neige ou grêle

Je ferai front, les mains s’ouvrant

Droit devant, pour, sans être frêle

Marcher vers cet ailleurs distant

 

L’âme en paix et le corps fébrile

Quittant la rumeur de la ville

J’irai les yeux dans le noir pénétrant

Marcher vers cet ailleurs distant

 

Le pas crissant sur le chemin

J’abandonnerai mes demains

Au pied d’un arbre, pour riant

Marcher vers cet ailleurs distant

 

Et qu’importe, ce qui ne fut

Le faire, je ne pourrai plus

Ne me reste que cet instant

Marcher vers cet ailleurs distant

 

08/01/2003


 

UNIR ENFER ET DÉSESPOIR

 

Sans plus rien voir, ni rien comprendre

Sur bande d’urgence, cheminer

Laisser l’espoir dans ses méandres

Crachant son doute à satiété

 

Traîner sa chair dans la pénombre

Pour ne pas voir l’âme sombrer

Aspirer l’air dans ses décombres

En essayant de s’y cacher

 

Et chaque jour sentir la corde

Autour du cou se resserrer

Dans la froideur de la discorde

Sans un chemin pour s’échapper

 

Alors lassé, sans avenir

Finir ici sa pauvre histoire

Chasser le jour et d’un soupir

Unir enfer et désespoir.

 

 

 

 


VITE AVANT…

 

Un nuage est passé dessus

Effaçant tout sur son passage

Me laissant le cerveau à nu

Avec plus rien dans les bagages

 

Même mon nom a disparu

Derrière mon visage blanc

Et qui sont ces gens inconnus

Qui m’oppressent en me parlant

 

A l’abri dans ma blanche page

Je cherche un mot qui me rassure

Mais ma mémoire est trop volage

Et son absence me fissure

 

Un mot, une main qui se tend

Ma femme pleure dans mes bras

Je lui dis mon amour pourtant

Elle qui est toute ma joie

 

Vite avant qu’un autre nuage

Efface tout sur son passage

Me laissant tout seul dans mon coin

Loin de tous ceux qui sont les miens

                    



RÊVE D'ÉTOILE

Jetant mes doigts au ciel
J’ai croché une étoile
Qui n’était pas trop vieille
Et l’ai bordée de voiles

Voiles pris un par un
Sur des pics enneigés
Puis j’ai fait un couffin
Couleur d’aube dorée

Regardant mon travail
J’aperçus une larme
Et l’étoile qui tressaille
Se mourant sans vacarme

Paniqué, effrayé
Je lui parle tout bas
De mes rêves d’été
De son soyeux éclat

Fatiguée, apeurée
Elle me dit ses peurs
D’au ciel ne plus briller
De perdre sa splendeur

ALORS

Jetant mes doigts au ciel
J’ai renvoyé l’étoile
Qui n’était pas si vieille
Pour mourir dans ma toile

Et j’ai rendu les voiles
Aux sommets enneigés
Défait aussi la toile
Du couffin mordoré

Puis m’allongeant au sol
Me suis mis à rêver
Que dans les bras d’Éole
Mes doigts avaient fautés

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VAISSEAU-FANTÔME

Au loin, la mer emmitouflée dans une écharpe de brume
Étouffant mes sanglots qui courent, ricochant sur les dunes
Ici, pieds nus, assis dans le sable, je regarde au loin
Les yeux en Terre de lune, humides à leurs demains

Des mouettes criardes, plongent ou planent dans le ciel
Traçant des orbes blanches dans cet horizon mercuriel
Le passé est fini, il n’aura même pas de refrain
Laissant partir devant lui, un corps, une âme qui ont faim

Très doucement le soleil apparaît, traversant les nuées
Rosissant comme si il avait peur de troubler mes pensées
Une larme marque sa route jusqu’au dos de ma main
Gouttelette infime, prémisse de la houle qui vient

Et quand enfin irrévocablement le matin s’installe
Détruisant mon isolement comme l’on casse un bocal
Je ramasse mes rêves dans la toile de mon chagrin
Et m’en retourne à la vie pour un autre jour de destin

Maintenant la chaleur arrive, en moi il fait toujours froid
Mon cœur est en dérive sur le long fleuve de mes émois
J’ai mal de la quille au mât, voilier de mon propre destin
Vaisseau-fantôme hurlant sa peur de ne trouver son chemin 




LES DOIGTS DU VENT

Quand le vent fouette sa face dure
Étirant ses cheveux comme un drapeau
On voit dans ses yeux naître l‘aventure
Et se gonfler les voiles d’un bateau

On lit à chaque ride de ses joues
L’histoire d’amis marins disparus
De ceux à qui le destin fit la moue
Laissant leurs dernières pages à nu

Ses cheveux ont la couleur des embruns
Ses yeux celle des océans profonds
Toujours en quête de nouveaux chemins
Aux vents forts, qui les voiles gonfleront

Ses mains noueuses rêvent gouvernail
Bôme, drisses, écoute de grand voile
D’écume grondante sur le corail
De sels marins jusqu’au fond de leurs moelles

Son cœur, lui, bat au rythme des ressacs
Aux vibrations de ses vagues qui claquent
Écoutant le chant des drisses qui sifflent
Au bout des longs doigts du vent qui les giflent

 

 


L’ENFANCE QUI S’ENVOLE

L’enfance qui s ‘envole
À chaque coup de blues
L’étrange farandole
Du malheur qui émousse

À chaque petits pas
Tels ceux d’un nouveau-né
On va cahin-caha
Vers le terme annoncé

L’enfance qui s’étiole
Comme une étoile s’éteint,
Dans de longues rigoles
Aux cages sans jardins

Dans chaque tags marqués
Chaque amour efflanqué
Un peu plus de souffrir
Un peu moins d’avenir

L’enfance qu’on picole
Dans l’alcool du passé
Dès qu’on quitte l’école
Pour l’acier usiné

Et au bout du chemin
Vouloir recommencer
Pour changer son destin
Plus vouloir regarder

L’enfance qui s’envole

© Luc Rose                                 Tous droits réservés

 

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Liste de poésie classiques, contemporaines ou autres       
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Liste Haïku / Haiquoi-fr
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