KEVISA

La véritable Histoire du Monde

L’histoire n’est qu’un tas de mensonges sur les événements qui ne se sont jamais passés, racontés par des gens qui n’étaient pas là. (George Santayana)
C'est parce qu'il faut bien connaître le passé pour bien construire l'avenir que j'ai décidé de faire éclater la vérité… L'Histoire que l'on nous enseigne, l'Histoire Officielle, n'est que l'histoire du mensonge et de l'imposture. Instruit par des sources dignes de foi mais que je ne peux toutes vous dévoiler, j'ai pris la décision de vous faire partager ces révélations dans cet indispensable ouvrage qui, j'y compte fermement, remplacera bientôt nos médiocres manuels scolaires qui ne servent qu’à fabriquer des générations d'ignares.
Parce que ce sont les petites histoires qui font la Grande Histoire, je vous invite, par les textes suivants écrits ou retranscrits sous le seul éclairage de la vérité historique, en toute simplicité, à prendre connaissance de la véritable Histoire du Monde.

Le bon roi Henri IV  :
Une fin tragique et stupide !


S'il est un procès qui mériterait d'être révisé, c'est bien celui du pauvre
François Ravaillac qui eut maille à partir avec le bon roi Henri IV. En
effet, en y regardant de plus près, on s'aperçoit que les torts étaient
partagés!

Aujourd'hui, l'incident ne mériterait guère
Que deux ou trois lignes dans la rubrique "faits divers",
En dernière page des quotidiens parisiens,
Mais à l'époque il fit grand bruit, on s'en souvient.
Les échotiers des gazettes firent leurs choux gras
De cette histoire, qu'ils imprimèrent à tours de bras.

Par une chaude journée de seize-cent-dix,
Henri, entouré de quelques amis complices,
Faisait honneur à une bonne poule-au-pot
Pour s'évader un peu de son royal boulot.
L'atmosphère était joviale et le vin coulait.
Henri pensait moins au royaume qu'à rigoler
Des blagues grivoises de ses voisins de tablée.
Une bonne humeur que rien n'aurait pu troubler.
Après le repas copieusement arrosé,
Henri, bien gavé et un plus que grisé,
Décida de rendre visite à son ami,
Maximilien de Béthune, le Duc de Sully.
Délaissant son carrosse officiel à cocarde,
Henri préféra s'en aller seul sans sa garde,
Dans son véhicule privé décapotable,
Celui avec un panache blanc, couleur sable.
Pour se rendre près de la Bastille, chez Sully,
Henri dut traverser la moitié de Paris.
Peu habitué à voyager sans chauffeur,
Il n'avait pas vraiment choisi l'heure la meilleure :
C'était celle où la circulation faisait rage
Et il se trouva pris dans un embouteillage
Au milieu de la rue de la Ferronnerie.
Tous les équipages avançaient au ralenti.
Et bercé par cette lenteur, Henri s'assoupit
En cuvant ses trois ou quatre bouteilles de Brouilly.
Par pudeur, je dirai qu'il était éméché;
Vous devez traduire bien sûr qu'il était torché !
Ce faisant, il refusa la priorité
A un piéton, juste sur un passage clouté,
Le renversant, heureusement sans gravité.
Le type, se relevant, se mit à l'insulter !
Redoutant l'arrivée de la maréchaussée,
Henri crut bon de faire valoir sa qualité,
Avant d'être obligé de subir l'alcootest
Qui aurait révélé son ivresse manifeste.
Mais le quidam furieux réclama un constat,
Plongeant le pauvre roi Henri dans l'embarras.
Le ton monta et ils en vinrent bientôt aux coups.
Face à ce dur à cuire, Henri eut le dessous.
Il faut dire que l'irascible eut l'inélégance
De prendre un couteau pour le larder en tous sens.
Célèbre dans l'Histoire, on connaît bien la suite :
L'incarcération, le jugement et ensuite
Un bel écartèlement en place publique.
Un exemple révoltant de justice inique !
Car, si le geste du dénommé Ravaillac
Méritait une volée de coups de matraque,
Le roi Henri avait mérité, je présume,
Une suspension de permis à titre posthume,
Moindre des choses pour ce chauffard impénitent
Qui en était à son dix-huitième accident !

Mais dans ce monde d'injustice, la foule en détresse
Pensa que le roi Henri valait bien une messe
Et lui fit des obsèques nationales de héros.
Comprenez-vous l'outrance,  pour un simple poivrot ?

Un bonheur hors saison

Vingt ans, au printemps de ton bel âge,
Tu étais prête à tous les voyages.
C'était le début de ton histoire,
Sans les blessures de la mémoire.

Sous le soleil d'un été artificiel,
Toutes les rencontres étaient providentielles.
Chaque jour, une promesse de bonheur
Pour qu'elle éclaire toutes tes heures.

Mais en automne, déjà, s'assombrissaient tes soirs ;
Nulle étoile dans un ciel presque noir ;
Une grande aventure proche de sa fin
Et que tu commences à comprendre enfin.

En hiver, aujourd'hui, reste-t-il un rivage ?
Une île, une dernière terre sauvage ?
Au bout de ta route, un ultime refuge
Pour t'abriter la nuit du déluge ?

John, Clara et tous ceux de ton âge,
Te souviens-tu de leurs visages ?
Ils suivaient le même chemin avant de s'en aller,
Te laissant seule, sans plus personne à qui parler,
Que le dealer, ton marchand de quatre saisons
Qui ne veut te vendre qu'un bonheur hors saison.

Tu avais tous tes amis au début.
Insouciants, vous n'aviez pas d'autre but
Que d'aimer et découvrir les plaisirs
Et, sans jamais, penser pouvoir souffrir.

Vous aviez tous la même envie de bonheur,
La rage et la foi, la même candeur.
Vous viviez de partage et d'amitié,
Vous n'aviez aucun besoin de pitié.

Certains se sont arrêtés en chemin,
Ne sont plus là pour te tenir la main ;
Ils ne veulent plus ou ne peuvent plus ;
Pourquoi tu continues, tu ne sais plus.

Tu es perdue, tu cherches ta route,
Il n'y a plus seulement que le doute.
Tu ne sais plus combien dure le temps,
Tu sais que là-bas, personne n'attend,
Que le dealer, ton marchand de quatre saisons
Qui ne veut te vendre qu'un bonheur hors saison.

John, Clara et tous ceux de ton âge,
Te souviens-tu de leurs visages ?
Ils suivaient le même chemin avant de s'en aller,
Te laissant seule, sans plus personne à qui parler,
Que le dealer, ton marchand de quatre saisons
Qui ne veut te vendre qu'un bonheur hors saison.



Indifférence

Est-ce vraiment si loin d'ici
Qu'ils vivent sans être libres ?
Toi, tu te battras jusqu'au bout,
C'est écrit dans ton Grand Livre.
Toi, tu continueras debout.
Quelque chose qui te dépasse.
Choc en plein cœur,
Mais tout passe.
Pourquoi vouloir crier aux fous ?
Comment savoir qui sont les loups ?
Est-ce au Sud, est-ce en Orient,
Qu'ils survivent sans être égaux ?
Sous quel soleil, dans quel désert,
Sous quel hiver, dans quelle misère ?
C'est sûrement très loin d'ici,
Bien au-delà de l'horizon,
Sur les chemins d'autres destins.
Quelque chose qui te dépasse.
Choc en plein cœur,
Mais tout passe.
Pourquoi vouloir crier aux fous ?
Comment savoir qui sont les loups ?
Alors, tu peux rester assis.
Est-ce ta faute, celle des tiens,
S'il leur faut mourir en enfer ?
Ont-ils la foi et le courage ?
Ont-ils encore un peu d'espoir ?
Le paradis l'ont-ils cherché ?
Pourquoi ont-ils cessé d'y croire ?
Ils ont perdu leur idéal
Entre les murs de leur prison,
Et mérité leur purgatoire.
Quelque chose qui te dépasse.
Choc en plein cœur,
Mais tout passe.
Pourquoi vouloir crier aux fous ?
Comment savoir qui sont les loups ?
Alors, tu peux rester couché.
Une telle urgence, tant de colère,
Une telle révolte, tant d'impuissance.
Le cœur blessé, l'âme meurtrie,
Le désespoir à fleur de peau.
Et puis poussières dans ta mémoire.
Et, pour finir, l'indifférence
Pour oublier toute souffrance
Et retrouver ton innocence,
Puisque tu ne peux plus rien faire,
Puisque tu ne veux plus rien faire.
Quelque chose qui te dépasse.
Choc en plein cœur,
Mais tout passe.
Pourquoi vouloir crier aux fous ?
Comment savoir qui sont les loups ?



A mort !

L'abomination d'un crime
Réclame-t-elle vengeance ?
C'est un funeste engrenage !
Mais non, ce n'est que justice !
Est-il aucun crime juste
Qui puisse jamais réparer
Un autre commis avant lui ?
Depuis cette loi du Talion
Le monde a-t-il évolué ?
Bien sûr ! Puisque l'office a lieu
A l'aube ou au crépuscule !
Toutes les sensibilités
Sont soigneusement épargnées.
Certes, en quelques lieux obscurs,
La foule assiste, comme aux jeux,
A la mise à mort méritée
De la lie de l'Humanité.
Ce n'est pas la respectable
Marque de notre société.
Avec dignité, nous savons
Exécuter la volonté
De nos peuples souverains,
De punir, sans aucun regret,
Les odieux coupables en secret,
Loin de tout regard indiscret.
Nous sommes, nous, civilisés !
Mais est-ce vraiment différent ?
Sur la Grand Place publique
Ou dans une pièce intime,
Le passé reste écrit.
Et au sang, s'ajoute le sang
Versé ou cessant de couler
Dans des veines si impures,
Que mes doutes me paraissent
La pire des obscénités.
Mais je plains le bourreau...



Adieu 

Je crois que jamais, au cours des mois précédents,
Je ne l'avais vue avoir peur ou bien cédant
Au découragement, à la résignation.
Elle luttait, comme elle faisait tout avec passion.

Je vois maintenant cette femme sur son lit,
Amaigrie, le regard absent, le teint pâli
Et je sais qu'elle n'a plus l'envie de poursuivre,
Mais qu'elle ne redoute pas ce qui va suivre.

Je reste devant elle, effrayé, impuissant.
Je voudrais tant pouvoir lui offrir tout mon sang
Pour guérir le sien, fleuve vicié et vicieux
Qui l'entraîne à la dérive vers d'autres cieux.

Je voudrais une trêve, un sursis, juste un jour,
Ou bien tout figer, tout suspendre, pour toujours.
Combien, j'aurais encore à me faire pardonner,
Et de poèmes que j'aimerais lui donner.

Je n'en ai plus le temps, l'occasion est passée.
Les instants présents s'enfuient déjà vers le passé
Et m'apprennent que les regrets sont inutiles,
Presque tout autant que les mots sont futiles.



Danger

Celui-là doit sûrement peindre avec ses pieds ;
L'autre a noyé sa plume dans l'encrier ;
Que demander à ce chanteur, sinon pitié ?
Et cet acteur qui ne pourra jamais briller ?
Mais je préfère de loin, pourquoi le nier,
Un artiste exécrable au plus fameux guerrier.
Chanson, vers, scène ou tableau ratés et foutus,
Sont bien moins dangereux qu'une balle perdue.



Demande-moi

Demande-moi ce que je ne possède pas ;
Exige de moi ce que je n'ai jamais dit ;
Ordonne-moi ce que je n'ose pas faire ;
J'irai partout chercher tout ce que tu voudras ;
Je trouverai les mots, sacrés ou maudits ;
J'aurai le courage d'un chevalier de fer.

Que m'importe ce que valent tes soupirants,
Je ne crains plus personne, pas même mes peurs ;
L'amour qui m'anime saura me transcender.
Je ne veux plus qu'être une ombre respirant
Ta douce présence et veillant sur ton bonheur.
Je suis prêt à tout ; Tu n'as qu'à le demander.

Je serai poète, magicien ou géant,
Celui que tu voudras et que tu choisiras ;
Je ne veux m'imposer ni respecter de loi,
Sauf celle de t'aimer de tout mon cœur béant ;
Je construirai tous les châteaux dont tu rêveras ;
Je suis prêt à tout, sauf… à renoncer à toi.



La danse des diables

Je serais prêt à tout donner
Pour partager, en plein accord,
Tes coups de blues, tes coups du sort ;
Mais tu ne veux me pardonner.

L'amour ne peut plus refleurir,
Il ne peut plus être sauvé.
J'ai des regrets... si tu savais...
J'avais du bonheur à t'offrir.

Toi tu te sens une autre femme
Et tu me laisses dans les flammes
Où dansent des diables vengeurs
Qui m'apprennent le malheur

Je serais prêt à tout laisser 
Pour me tenir à tes cotés ;
Mais je sais bien la vérité,
Je ne ferais que te blesser.

Quand je repense à ces années,
Je te vois comme un mirage,
Juste au bord de ce rivage
Où tu allais te promener.

Toi tu te sens une autre femme
Et tu me laisses dans les flammes
Où dansent des diables vengeurs
Qui m'apprennent le malheur

Je serais prêt à tout jouer,
Jouer ma vie d'un coup de dé,
Si quelqu'un pouvait m'aider,
Me dire comment nous retrouver.

Tu as choisi une autre voie,
Loin de mon cœur et de ma vie,
Vers d'autres jours, d'autres envies,
Là où je n'entends plus ta voix.

Toi tu te sens une autre femme
Et tu me laisses dans les flammes
Où dansent des diables vengeurs
Qui m'apprennent le malheur
Ce qu'ils m'apprennent me fait peur
En se trompant, parfois on meurt
On meurt d'amour à chaque jour
Moi, chaque jour, je meurs d'amour 



L'amour le plus pur

Elle fait l'amour avec ses yeux,
Immenses comme les cieux,
Le cœur plein de confiance
Et léger d'insouciance.
Elle ne veut qu'un sourire,
C'est tout ce qu'elle désire.
Le plus petit bonheur
Efface tous ses pleurs ;
Juste un baiser câlin
Ou un clin d'œil malin.
Elle est l'amour parfait.
Quand, dans son lit défait,
Elle s'éveille au matin,
Les gestes incertains,
Sa gaieté revient vite,
Dès que la visitent 
Des visages connus.
Et elle se lève nue,
Si belle et impudique,
Et pourtant innocente,
D'une fraîcheur de menthe.
Mais que sera demain
Si de perverses mains
Viennent salir l'amour,
Le blesser pour toujours ?
Comment imaginer
Qu'il puisse, à peine né,
Subir l'ignominie
D'une horreur infinie ?
Ces hommes criminels
D'une tâche éternelle
Comprendront-ils un jour ?
L'enfance est pur amour.



Les lois de Babylone

A chaque pas, j'entends les nouveaux prophètes
Proclamer que je serai sauvé ou damné,
Selon que j'entrerai ou pas dans la fête
Célébrée depuis bien avant que je sois né.

Les apôtres sont légion, devenus marchands.
Les riches vitrines ont remplacé les autels.
Pour se laver de leurs pensées de mécréants,
Là, se dirigent en foule les fidèles.

Comme les pages d'un nouvel évangile
Indiquant le chemin de la félicité,
Les publicités, dans ce monde fragile,
Sont les tables de la Loi, les seules vérités :

L'inutile tu achèteras.
Et peu après tu jetteras.
Sans attendre tu remplaceras.
Et sans fin tu recommenceras.
Le saint Commerce tu respecteras.
Le seul Dieu Argent tu honoreras.

Moi l'inutile je n'en veux pas ;
Moi je veux chasser les marchands du temple ;
Et puis après, danser sur les autels
Avec la foule de tous les rebelles ;
Moi je ne veux pas suivre les lois 
Des faux prophètes de Babylone.

Mais ils s'entêtent et ils me répètent :

L'inutile tu achèteras.
Et peu après tu jetteras.
Sans attendre tu remplaceras.
Et sans fin tu recommenceras.
Le saint Commerce tu respecteras.
Le seul Dieu Argent tu honoreras.

Mais je résiste et je persiste :

Moi l'inutile je n'en veux pas ;
Moi je veux chasser les marchands du temple ;
Et puis après, danser sur les autels
Avec la foule de tous les rebelles ;
Moi je ne veux pas suivre les lois 
Des faux prophètes de Babylone.



Des paroles de réconfort

Des paroles de réconfort
Ne pourront me rendre plus fort.
Je sais que je suis possédé ;
Je hais ceux qui veulent m'aider.

Je ne peux plus rien diriger.
Je ne crois pas exagérer
En disant que, son souvenir
Hantera tout mon avenir.

Vous me dites de l'oublier.
Mais c'est vous les fous à lier.
Que savez-vous de mon amour
Que je revis jour après jour ?

Ce n'était que ma destinée
De me laisser assassiner
Par la seule que j'ai aimée
Plus que je n'aurais cru jamais.

Alors taisez-vous les vautours
Qui venez me tourner autour ;
Gardez pour vous votre pitié
Et puis aussi votre amitié.

Tous les sentiments du monde
Me paraissent si immondes,
Puisque aucun d'eux n'est capable
De me rendre moins coupable.

J'ai cent fois mérité mon sort,
Sans doute pire que la mort,
Parce que, moi, je l'ai blessée
Si souvent et qu'elle s'est lassée.

Vous me jouez votre scène :
Qu'elle n'en valait pas la peine,
Que je trouverai beaucoup mieux…
Vous êtes tellement odieux !

Je ne vous ai rien demandé ;
Alors, ne venez pas m'aider
Si vous lui manquez de respect.
Partez et laissez-moi en paix !



La Joconde

Je n'ai jamais visité les musées,
Cette manie m'a toujours amusé.
Pourtant j'ai rencontré la Joconde.
C'est grâce à une fille un peu ronde,
Dessinant à la craie sur le trottoir.
C'était juste avant la tombée du soir,
Dans une rue du quartier Saint-Germain ;
J'avais pu voir la magie d'une main
Touchée par une grâce divine ;
Plus douce qu'une main qui câline,
Je la voyais caresser le béton,
Faisant naître les couleurs et les tons,
Le visage et le sourire pour finir.
Certains passaient sans même ralentir,
D'autres comme moi s'étaient arrêtés
En voyant cette éphémère beauté
Que Léonard n'aurait pas reniée.
J'étais ému, je ne peux le nier,
Et un peu triste aussi, à la pensée
Que ce tableau serait vite effacé.



L'Histoire

L'Histoire n'est souvent que littérature,
Des récits rêvés de grandes aventures,
Ou la narration de simples anecdotes ;
A la vérité, un puissant antidote.

Ceux qui nous gouvernent savent qu'ils ont raison
De nous tenir tous éloignés de ce poison.
Mensonges et secrets sont les clés du pouvoir ;
Nous sommes indignes d'accéder à ce savoir.

Si tu contredis la version officielle,
Seras-tu lapidé, torturé ou brûlé,
Ou seulement ignoré, raillé, méprisé ?

Il faudrait une grâce providentielle,
Pour bien te protéger et t'éclairer assez
A la recherche vétilleuse du passé.



Mon île

C'est une île insolente
Belle et charmeuse 
Sauvage et violente
Insouciante et heureuse
Mais sublime captive
Des flots qui l'entourent
Elle reste rétive
A d'hypocrites amours
Pour être aimé d'elle
Il ne suffit pas d'être un fils
Ou un compagnon fidèle
Il faut laisser le temps faire son office
Et l'observer, l'écouter et apprendre
Mille vies ne suffiraient pas pour comprendre
Tous les mystères qu'elle recèle.
Il faudrait, comme elle, être éternel.

A partir trop loin, trop longtemps,
La mémoire cède et les ombres s'installent.
Au mendiant de souvenirs, le temps ne fait pas charité.
J'ai trop regardé l'avenir, oublié mon passé,
Au mendiant de souvenirs, le temps ne fait pas charité.

J'ai grandi dans cette île.
J'en ai connu toutes les saisons,
Des larmes du ciel aux orages violents,
Des brûlures du soleil au retour des frimas.
J'ai quitté mon île,
Lui préférant des paysages
Tièdes, lisses et sans histoire.
Je l'ai oubliée si longtemps.
J'ai voulu revoir mon île,
Mon passé et mes racines.
Je n'ai rien retrouvé.
Ni les couleurs, ni les senteurs.
Mon île ne m'a pas reconnu.
Ai-je donc tant changé ?
Ou bien se venge-t-elle,
Cette amie délaissée ?

A partir trop loin, trop longtemps,
La mémoire cède et les ombres s'installent.
Au mendiant de souvenirs, le temps ne fait pas charité.
J'ai trop regardé l'avenir, oublié mon passé,
Au mendiant de souvenirs, le temps ne fait pas charité.



Tu me disais

Tu me disais :
Si tu t'en lasse, j'irai repeindre les cieux
De toutes les couleurs de tes moindres désirs,
De tes caprices, tes envies, tes délires.
Pour tout réinventer, j'égalerai les Dieux.
Tu me disais :
Au milieu des étoiles, je mettrai des fleurs 
Pour que tu t'allonge et t'endorme ravie, apaisée,
Heureuse et tranquille, bercée par mes baisers,
Déposés doucement en légère vapeur.
Tu me disais :
Je veillerai près de ta couche céleste,
Fidèle gardien, plein de courage et d'orgueil,
Guidant ton sommeil et t'évitant les écueils 
Des rêves mauvais aux images funestes.
Tu me disais :
Toujours, à ton réveil, je serai là, tendu,
Guettant ton tout premier sourire, magique.
Et pour toi, je ferai jouer des musiques
Que même aucun ange n'a jamais entendues.
Tu me disais :
En agapes, je t'offrirai des fruits d'or.
Et je t'emmènerai visiter tous les mondes
Pour les animer de ton âme féconde.
Et nous recommencerons encore et encore…

Tu es parti, pour je ne sais quel mystère,
Ruinant ma vie par un tremblement de terre,
Rien qu'un doigt de feu, un zeste de tonnerre,
Un goût de cendres et une odeur amère.
Tu me disais, mais tu mentais
Je t'ai cru, mais j'ai perdu

Je te croyais :
Mon ciel est triste, il n'y a rien de pire,
Je n'ai plus nulle envie ni le moindre désir,
Seulement de me noyer dans mes souvenirs,
Où je te vois sans cesse me sourire.
Je te croyais :
Les étoiles sont mortes et les fleurs sont fanées ;
Je ne peux plus dormir depuis ton départ
Seule dans ce grand lit, je cherche ton regard,
Mais je sais bien que nos heures ont sonné.
Je te croyais :
J'espère chaque nuit comme la dernière ;
Il n'y a plus de musique et j'ai perdu la foi,
J'ai peur de me perdre dans ces mondes sans toi,
Tomber dans les pièges où n'est pas ta lumière.

Tu es parti, pour je ne sais quel mystère,
Ruinant ma vie par un tremblement de terre,
Rien qu'un doigt de feu, un zeste de tonnerre,
Un goût de cendres et une odeur amère.
Tu me disais, mais tu mentais
Je t'ai cru, mais j'ai perdu
Tu es parti, pour je ne sais quel mystère,
Ruinant ma vie par un tremblement de terre,
Rien qu'un doigt de feu, un zeste de tonnerre,
Un goût de cendres et une odeur amère.
Tu me disais, mais tu mentais
Je t'ai cru, mais j'ai perdu.



Dur commerce

Elle fait commerce ; c'est ce qu'elle aime le moins.
C'est la vie ! On ne fait pas toujours ce qu'on veut.
Elle a un enfant, alors elle serre les poings.
Elle ne sait faire que ça ; Le fait de son mieux.

Elle affiche son sourire le plus commercial,
Propose aux passants son plus bel étalage,
En tous temps, même par le froid le plus glacial.
Elle pense que tout ça n'est plus de son âge.

Elle s'efforce de bien soigner son service.
Malgré son ennui qui la met au supplice,
Elle essaie de ne pas montrer son désespoir.

La concurrence est rude et le client est roi,
Voulant de la marchandise de premier choix.
Elle est prostituée sur son bout de trottoir.



Elle

Avec Elle, j'ai connu l'Enfer et le Paradis.
Je l'ai aimée, puis détestée,
Sans jamais cesser de l'aimer.
Elle était ma source vitale empoisonnée.

J'avais pris mon glaive à l'acier le mieux trempé,
J'étais son chevalier et son esclave.
J'avais tous les courages.
Dans les yeux, l'âme et le cœur, j'avais son image. 

Je savais pourtant le combat sans issue,
Parce qu'il n'y avait pas d'autre ennemi
Que le temps, l'indifférence et l'ennui
Que déjà elle avait de notre vie.

Sentinelle à l'affût de tous les dangers,
Je ne l'ai pas vue me poignarder de son mieux,
Sans rien faire, juste en détournant les yeux,
S'enfuyant vers d'autres lieux sous d'autres cieux.

Mes remords et regrets se confondent aujourd'hui.
Je hais mon amour et j'aime ma détresse.
Par son absence, Elle reste encore la maîtresse
De chacun des instants que je vis par faiblesse.



Le retour à Gaïa

Au dernier souffle qui lentement s'éteindra,
Le vieux corps usé, fatigué s'apaisera.
Et l'esprit plus lucide que jamais la verra,
Dans une fulgurance, un scintillement,
Une explosion de couleurs, un ravissement,
A nulle autre pareille dans ses parements.
La fin de ta route.
La fin de tes doutes.
Tu connaîtras la paix du retour à Gaïa.



L'Hôtel du Passage


Une chambre d'hôtel à la place du cœur,
Où s'arrêtent une nuit d'inconnus voyageurs, 
Venus sans bagages, ni l'idée de rester.
Elle sait bien tout cela, mais ne sait résister.
Elle garde l'espoir que, peut-être, une fois,
Un seul s'attardera et entendra sa voix
L'implorer de mentir, de ne pas lui dire
Que, déjà au matin, il pense à repartir.
L'accueil est aimable, le séjour luxueux,
Pourtant ils s'en vont, sans une promesse.
Une indifférence, qui encore la blesse.
Des fragments de sa vie, des petits souvenirs
Qu'elle tente d'oublier, d'un geste de la main.
Elle va changer les draps, et attend le prochain.

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

C'est jamais complet à l'Hôtel du Passage
Y a qu'des chambres libres à l'Hôtel du Passage

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

Derrière son comptoir, elle surveille l'entrée,
Elle va peut-être enfin pouvoir le rencontrer,
Son beau prince charmant, le client idéal,
Qui ne s'enfuira pas à la sortie du bal,
Un jeune premier, comme dans les illustrés.
Elle se prend à rêver, mais reste concentrée,
Il y a du T.A.F, il faut que tout soit parfait,
Elle n'a vraiment pas le temps de philosopher.
Elle refait la poussière et nettoie les carreaux.
C'est bientôt l'heure pil'poil du prochain T.G.V,
Elle ne doit surtout pas rater son arrivée.
Dans ce train, elle sent qu'il y a le bon wagon.
Il y a foule à la saison des vacances,
Mais elle sait qu'il est là, c'est son jour de chance.

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

C'est jamais complet à l'Hôtel du Passage
Y a qu'des chambres libres à l'Hôtel du Passage

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

Si elle se plante, elle essuie une larme,
Mais c'est pas pour ça qu'elle va rendre les armes.
Le petit soldat qui garde la caserne
A l'esprit qui s'évade dans la luzerne.
Mais elle reste là, pour monter la garde.
Même si personne n'y prend garde,
Elle soigne sa tenue, prête pour l'inspection.
Volontaire pour une mission séduction,
Elle accueille ses camarades de dortoir
Sans illusion, mais jamais sans s'émouvoir :
Ce sera encore une belle bataille ;
Elle récoltera peut-être une médaille,
Epinglée sur son cœur d'un pincement léger,
Et saura qu'elle a raison de tout partager.

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

C'est jamais complet à l'Hôtel du Passage
Y a qu'des chambres libres à l'Hôtel du Passage

C'est la taulière de l'Hôtel du Passage
Il n'y a que pour elle que c'est le terminus
Ses pensionnaires n'attendent que l'omnibus
Pour s'tirer vite, sans laisser de message
A la taulière de l'Hôtel du Passage

Je ne veux pas mourir guéri !

Repens-toi, rentre dans le rang !
Fais donc soigner ce mauvais sang 
Qui t'entraîne à méconnaître 
L'enseignement de tes maîtres !

C'est là un très grand mystère,
Ce bien pénible clystère, 
Que veulent tous nous prescrire
Ces médecins en délire.

Mais leur sacro-saint traitement,
Qu'ils nous délivrent savamment
Pour guérir notre morale,
N'est-il pas pire que le mal ?

Est-ce que je nuis à quelqu'un
A n'être pas tout à fait sain ?
Ou alors leur fais-je tant peur
A ces parangons de pudeur ?



In memoriam 

Faire l'oraison funèbre 
D'un personnage célèbre,
Est un art très difficile
Et bien souvent inutile.

Les officiels, les m'as-tu-vu
Et la foule des parvenus,
Chacun y va de son couplet,
D'une litanie de regrets.

A supposer que le défunt
Fut, en son temps, un esprit fin,
Point vaniteux ni crédule,
Il fuirait ce ridicule.

C'est souvent de faire-valoir
A l'étalage d'un savoir
Que servent ces cérémonies, 
En bonne et simple hypocrisie.

Mais peut-être aurait-il goûté,
Une tâche de vérité 
Faite par des anonymes 
Et la poignée des intimes.

Rien qu'un toast après la messe,
Non de faux airs de tristesse,
Aurait suffi comme aubade
Faite à un vieux camarade.




L'égoïsme 

La raison du plus juste est toujours méprisée.
La fascination du Mal a d'autres attraits
Et pousse aisément à commettre des méfaits,
Des péchés véniels aux crimes les plus prisés.

L'égoïsme est la plus belle des qualités
Que l'on puisse rêver, pour bien se protéger.
Lui seul, dans la nasse, permet de surnager.
Il serait fou de croire à d'autres vérités.

L'angélisme est une faiblesse qui ne peut
Se traduire que par des discours sirupeux,
Et ne doit conduire qu'aux pires tragédies.

Mais si quelques-uns uns veulent emprunter ce chemin,
Où l'on sait encore apprendre à tendre la main,
Le monde est peut être moins laid qu'on ne le dit.



Je t'écris

Je t'écris cette lettre,
Que tu ne recevras pas.
Que je ne t'enverrai pas.
Mais je voudrais, y mettre
Tout mon cœur et mes regrets,
Sans craindre, pour une fois,
Que sans voiles tu me voies ;
T'avouer tous mes secrets.
Je t'écris ce soir pour la première fois
A l'encre de mes larmes, mais sans drame.
J'ai sorti des vieux tiroirs de ma mémoire
Tout ce que j'aurais voulu t'écrire avant.
Je t'écris ce soir pour la dernière fois.
J'espère que tu sauras lire
En filigrane sur mes mots,
Et que tu comprendras mes maux,
Ceux qui n'ont plus d'avenir.
Je voudrais que tu ressentes
Ce que je n'ose exprimer,
Ce que je tairai à jamais,
Tout ce que tu représentes.
J'aimerais que tu devines
Le sens de tous mes silences,
Et le poids de ton absence
Dans le vide de mes ruines.
Je voudrais que tu écoutes
Ces mots qui disent "Je t'aime",
Pour qu'enfin tu me comprennes,
Que tu n'aies plus aucun doute.
Je t'écris ce soir pour la première fois
A l'encre de mes larmes, mais sans drame.
J'ai sorti des vieux tiroirs de ma mémoire
Tout ce que j'aurais voulu t'écrire avant.
Je t'écris ce soir pour la dernière fois.
Notre histoire est sans issue.
Ton départ est sans retour.
Tu m'as quitté à ton tour.
Si seulement j'avais su…
Peut-être, il se pourrait 
Que je puisse te revoir…
Mais nous devrions savoir,
Comme inutile serait
De nier l'évidence…
Je le sais. Je préfère,
A ces pâles chimères,
Jouer l'indifférence,
Et continuer à crier
Ton prénom dans mes rêves,
Et même si j'en crève,
Te permettre d'oublier.
Je t'écris ce soir pour la première fois
A l'encre de mes larmes, mais sans drame.
J'ai sorti des vieux tiroirs de ma mémoire
Tout ce que j'aurais voulu t'écrire avant.
Je t'écris ce soir pour la dernière fois.



Ton ami

Je veux juste être ton ami,
Même encore plus intime.
Je ne me suis jamais remis
De cette blessure infime.

La cruelle indifférence 
D'un sourire léger 
Est la pire des offenses,
Que tu puisse m'infliger.

Tu ne vois pas ma présence,
Je ne suis qu'un miroir discret
Captant quelques confidences,
Sans rien lire de tes secrets.

Tes soupirs ont tous un prénom
Que je maudis en silence.
Comme un petit chien de salon,
Je contemple tes absences.

Je ne veux pas que tu pleures
Je ne pourrais plus me taire
Je ne veux pas que tu meures
Je ne saurais plus quoi faire
Ne me rejette pas
Ne m'abandonne pas
N'aies pas de gêne avec moi
N'aies pas de honte avec moi
Je sais que je ne suis pas lui
Mais je serai là chaque nuit

Je voudrais te faire oublier
Et que tu ne voies plus que moi,
Alors faut-il te supplier 
Pour que tu vienne vers moi ?

Tu dois lire dans mon âme 
Que tu n'es pas seule à souffrir ;
Tu dois sécher tes larmes
Et voir ce que j'ai à t'offrir.

Je voudrais que tu comprennes
Que, lui, ne t'a pas méritée,
Que ça ne vaut pas la peine
De te cacher la vérité.

Tu dois maintenant m'écouter,
Et commencer notre histoire.
Et ne plus jamais en douter,
Ça continuera chaque soir.

Je ne veux pas que tu pleures
Je ne pourrais plus me taire
Je ne veux pas que tu meures
Je ne saurais plus quoi faire
Ne me rejette pas
Ne m'abandonne pas
N'aies pas de gêne avec moi
N'aies pas de honte avec moi
Je sais que je ne suis pas lui
Mais je serai là chaque nuit



L'arbre et l'enfant

Lorsque ma mère m'a donné la vie,
Mon père a planté cet arbre.
Une balise, point dans l'infini,
Qui a laissé le Monde de marbre.

Deux êtres parmi la multitude,
Dans l'anonymat, l'indifférence.
Pour une famille, une fortitude.
A la nature, une révérence.

Arbre et enfant : insignifiance,
Deux poussières du Grand Univers.
Pourtant, quelle magnificence
Mettant valeurs et lois à l'envers.

Qu'est-ce qu'un arbre face à, la forêt,
Les grands paysages, l'immensité ?
Et qu'est-ce qu'un enfant, quel intérêt ?
Seuls comptent les peuples, l'Humanité.

Pourtant quelle divine quiétude
A l'ombre du géant impassible,
Quelle bienheureuse solitude
Que lui seul rend encore possible. 

L'enfant n'est plus, seul l'arbre reconnaît
Cet homme qui compose avec le temps.
Si nul fol impie, un sacrilège ne commet, 
Il me survivra bien longtemps.



La fuite

Il m'est inconcevable de suivre longtemps
Le pas de cette troupe amorphe,
Résignée à subir quelque catastrophe,
Cette assemblée de vieillards qui comptent le temps.

La révolte réside aussi dans la fuite
Puisque je ne peux réussir à tout changer.
Je ne veux savoir par qui je serai mangé.
Je préfère m'épargner de voir la suite.

J'aurai donc, au moins, le courage des lâches :
Mieux qu'esclave ou rebelle, je serai fuyard,
Pour me faire oublier, me terrer quelque part.

Mais il faut surtout que personne ne sache
Ma décision de faire ma révolution :
Demain, c'est sûr, je donnerai ma démission.

La légende de Sarah-Jane 

Elle rêvait d'Hollywood dans son petit studio ;
On ne parle plus que d'elle sur les radios ;
Son portrait s'affiche sur les murs de sa rue ;
Elle pense, hormis la gloire, point de salut.

C'est la seule chose qui vaille la peine,
Le même triomphe sur toutes les scènes,
Partout, avant que le rideau ne retombe,
Et qu'elle s'en retourne à son théâtre d'ombres.

Elle signe des autographes et des photos,
Mais pour l'amour, la vie a posé son veto.
Comme toutes les étoiles, elle est seule
Et porte sa célébrité comme un linceul.

C'est la légende de sarah-Jane,
La cover-girl des magazines,
Une petite fille trop vite grandie,
Les ailes brûlées par les soleils,
Le cœur en miettes, à la dérive,
L'âme brisée, sa vie détruite
Par la légende de Sarah-Jane

Elle a tellement rêvé sa vie
En oubliant de la vivre,
Qu'elle n'a même plus envie
D'en feuilleter le grand livre.

Elle n'a pas quitté l'enfance.
Et n'a pas su se préparer
A affronter les souffrances
Qu'elle avait voulu censurer.

La réalité rattrape 
Les rêveurs et les fugitifs 
Qui basculent dans sa trappe,
Le temps d'un traquenard furtif

Le temps lui manque désormais.
Devant, ce n'est que le néant ;
Et derrière, que des regrets
Qui laissent un gouffre béant.

Elle voudrait juste s'endormir
Pour pouvoir encore rêver,
Juste un instant et se mentir,
Croire qu'elle peut être sauvée.

C'est la légende de sarah-Jane,
La cover-girl des magazines,
Une petite fille trop vite grandie,
Les ailes brûlées par les soleils,
Le cœur en miettes, à la dérive,
L'âme brisée, sa vie détruite
Par la légende de Sarah-Jane

Aujourd'hui, elle reconnaît à peine sa voix,
N'est plus aussi sûre d'avoir trouvé sa voie.
Elle se demande si tout ça vaut la peine,
Encore, de chanter et mourir sur scène.

Et elle se souvient de la petite fille
Qui rêvait déjà d'attraper ce qui brille,
Au premier rang, aux côtés de ses idoles,
Pour pouvoir enfin jouer les premiers rôles.

Elle ne veut pas décevoir tous ceux qui l'aiment,
Alors, elle continuera jusqu'au bout, même
Si elle sait qu'elle restera, seule, fidèle
A ce que tous les autres attendent d'elle.

C'est la légende de sarah-Jane,
La cover-girl des magazines,
Une petite fille trop vite grandie,
Les ailes brûlées par les soleils,
Le cœur en miettes, à la dérive,
L'âme brisée, sa vie détruite
Par la légende de Sarah-Jane



La musique 

Des mains agiles qui courent sur un piano
Ou virevoltent sur les cordes d'un banjo,
Font le miracle quotidien des musiciens,
Plus beau, plus fort que tous les tours des magiciens.

Quelques accords et quelques notes valent mieux
Que tous les longs discours vaseux et prétentieux;
Compris partout, par tous, langage universel ,
La musique est folklore, classique ou gospel.

Les différentes variations d'un même élan
Laissent tous les adeptes sur un même plan,
Celui de l'émotion plus que de la raison.

La musique exprime les peines, le bonheur ;
Elle s'adapte toujours à l'humeur, aux saisons;
Elle dira mieux que mes mots, ma joie, ma douleur.



Le chenil des fous

Ils élèvent leurs enfants, comme une meute
Dressée à devenir féroce et enragée,
Hurlant toujours au premier rang des émeutes,
Tous remplaçables du plus jeune au plus âgé.

Ils les nourrissent à la mort et à la haine,
Pour qu'ils soient dignes de leur mission :
Que dans la cité, la montagne ou la plaine,
Ils traquent leur gibier sans nulle concession.

Ils leur disent de n'attendre récompense
Qu'au-delà de la vie, de Dieu qui seul pense,
Et seulement, si la chasse a été bonne,
Qu'ils entendront tous les divins cors qui sonnent.

Ils veillent à la pureté de leur race ;
La bonté serait un signe de disgrâce. 
Ils n'ont que faire des sentiments paternels ;
Seule compte leur folie de servir l'Eternel.



La tentation de Faust

Si seulement je pouvais quitter cet enfer,
Je serais prêt à renoncer au paradis.
Je ne crois plus à ce qu'on m'a dit de faire,
Tout le bonheur que je veux, c'est pour aujourd'hui.

Comme ils m'ont trahi, je trahirai mes frères.
Je suis comme Faust qui attendrait Méphisto :
De mon âme, je suis prêt à me défaire.
Je ne regrette qu'il ne soit pas venu plus tôt.

J'ai, de plus en plus souvent, cette tentation
De la nuit qui me rendra la lumière.
C'est assez, je ne veux plus prêter attention
A la morale qui me laisse en arrière.

Je sais qu'il est un ami des plus dangereux,
Alors je renonce, comme à l'habitude.
Je sais être digne, sans être plus heureux
Et je demeure dans cette solitude.



La vie à deux

On se déchire et on oublie
Tous les mots, les pleurs et les cris
Qui disaient que tout est fini,
Que l'horloge a sonné minuit.

On espère encore y croire,
Du passé, ne plus rien savoir
Et conserver tous deux l'espoir,
Que devant nous tout n'est pas noir,

Les cadeaux et les poèmes,
Les baisers et les je t'aime,
Sont à chaque fois des promesses
Que plus jamais on ne se blesse.

Mais après un moment de clémence,
Nous retombons dans la démence.
Les scènes, les portes qui claquent
Et puis nous remettons nos masques.

Peut-on s'aimer sans se haïr ?
Doit-on rester ou bien partir ?
Se détester, pourtant s'aimer ?
Est-ce qu'on le saura jamais ?

Les bonnes manières

Ne mets pas tes coudes sur la table !
Tais-toi ! Ne parle pas la bouche pleine !
Mais où donc ai-je entendu ça ?
Chez moi ou dans un restaurant ?
Certainement pas en Afrique,
Car, dans quelques coins du pays,
Ils ont les deux pieds sur la table
Puisqu'ils mangent à même le sol ;
D'ailleurs, ils n'ont rien à manger,
Les convenances sont respectées !
Lorsque certains tendent les mains
Pour quémander un peu de pain,
D'autres lèvent le petit doigt
Parce qu'ils sont bien élevés,
Pas pour aider les affamés.
Une bonne diète un peu poussée
Les calmerait de leurs manières.

Qui suis-je ?

Je danse, de carnavals en bals costumés,
Vêtu de haillons ou d'ensembles en lamé
Et changeant de masque pour suivre la musique,
Tantôt séducteur, arrogant, mélancolique.

Prenez mes traces si vous voulez me trouver.
Sachez que personne n'est jamais arrivé
A me reconnaître ainsi grimé dans la foule,
Tentez l'expérience, si cela vous défoule !

Si, par hasard, vous me rencontriez demain,
Je ne serai plus celui qui vous tient la main,
Mais un passant indifférent ou dangereux.
Je vous assure que je ne joue pas un jeu !

Je suis comme vous, comme tous ces gens autour.
Au fond, peu nous importent les plus beaux atours,
Pourvu qu'ils révèlent notre âme sur l'instant,
Notre humeur, notre caractère si mouvants.

Je pourrais vous décrire celui que j'étais;
Sûrement pas, sans offenser la vérité,
Vous présenter l'homme éphémère que je suis,
Qui aura vécu avant la fin de la nuit.

                      ..........

Trente ans déjà… Trente ans enfin ! 

Trente années passées en prison, 
Jusqu’à en perdre la raison, 
Au plus sombre de la noirceur, 
Au fond du monde de l’horreur… 

Trente années d’une vie réglée 
Par les sinistres bruits de clés, 
Les cris qui déchirent la nuit, 
Tous les signes de la folie… 

Trente années à rêver d’air pur, 
Et à ne sentir que ces murs 
Souillés par tout ce vice infâme, 
A renifler le sang, le drame… 

Trente années d’évasion en rêve, 
Juste le temps d’une courte trêve, 
Un voyage au cœur du sommeil, 
Quelques heures passées au soleil… 

Trente années… et j’arrive au bout ! 
Demain, enfin, j’arrête tout ! 
Cette fois, je pars, pour de bon, 
Pour ma retraite de maton…

                 ...........

A la ville à la mort

Ils rêvent de grands espaces,
Mais bien à l'abri des barrières ;
Aller sur le trottoir d'en face,
C'est déjà passer la frontière.

Ils vivent le cour grand ouvert,
Mais ceux de l'étage plus bas
Ne sont pas du même univers ;
Ils sont parés au combat.

Ils sont prêts à faire confiance,
Mais dorment armés jusqu'aux dents ;
C'est pas vraiment de la défiance,
Mais il vaut mieux rester prudent.

Y'a des débordements d'amour
Derrière les portes blindées,
Mais là seulement, parce qu'autour,
Y aura personne pour les aimer.

Ils laissent s'envoler leurs rêves,
Mais pas plus haut que les gouttières ;
Quand la seule loi c'est marche ou crève,
Faut garder sa raison entière.

C'est là qu'ils ont toujours vécu,
Ils ne quitteront pas leur cité ;
Pourquoi partir vers l'inconnu ?
Le cimetière est à côté.

                ...........                

La tribu de béton

Le soir réveille les zombies
Qui se glissent hors de leurs abris ;
Et dans la tribu de béton,
Entre les clans c'est la baston.

Pour refaire un temps l'unité,
C'est ensemble qu'ils doivent lutter
Contre les barbares en armures
Qui viennent profaner leurs murs.

Dehors, la loi du Grand Empire,
Et s'y soumettre serait bien pire
Que de tomber dans l'escalier
Et de crever sur un palier.

Quand l'ennemi est repoussé,
Ils reviennent, comme par le passé,
S'étriper fraternellement ;
Et ça dure éternellement.

Les querelles sont toujours réglées
Par les plus sages, les plus cinglés,
Ceux qui dégainent sans sourciller
Quand quelqu'un veut les embrouiller.

Ils rêvent de quitter la tribu,
Mais quand ils ont fumé ou bu,
Ils savent que ce monde hideux
Est bien trop dangereux pour eux.

                      ...........
              

Evocation

Au soir de sa vie, il revoit en noir et blanc
Des images, un paysage, des visages d'antan.
Etreint par l'émotion, il sent son cœur noyé.
Surgie de sa mémoire, une voix éraillée
Chante une complainte qu'il écoute en frissonnant.
Lui revient aussi ce parfum malodorant,
Celui du désespoir, de la résignation.
Il avait vingt ans, plus d'imagination,
Plus de rêve et déjà plus aucun avenir.
Il était déjà vieux et tout près de mourir,
Plus de soixante ans avant ces vieux souvenirs.
Tout ce temps, il a traîné en lui ses blessures,
Qu'il n'a jamais évoquées, même par un murmure.
Pour qu'il n'oublie jamais, il y a sur son bras,
Ce hideux tatouage en caractères gras
Qui semble sur ce vieillard assez ridicule :
Juste un numéro de série, un matricule.

 

La voix de l'Harmattan

Ceux d'en face ne sont pas de sa race.
Ils s'affrontent, se détestent ou s'ignorent,
Parfois, se croisent en des rencontres futiles,
Sans rien partager d'autre que les mêmes peurs.
Quelques-uns uns, hélas trop rares, font exception
Car ils ont écouté la voix de l'Harmattan :
"Que le prédateur frappe le blanc ou le noir
Du zèbre, l'étrange et bel animal métis,
C'est un seul corps qui souffre, un seul cœur qui meurt."

   
Les petits pouvoirs  

Chacun dans sa sphère joue son petit potentat;
Un royaume sans partage, un état dans l'état.
Pour bien asseoir l'autorité, un uniforme
Ou un mandat officiel en bonne et due forme,
Un titre, un grade, une fonction pour le pouvoir
D'octroyer ou de refuser sans s'émouvoir.
Taisez-vous, vos papiers ! C'est le guichet d'en face…
Il faut subir, se résigner, quoiqu'on nous fasse.
Molosses ou roquets, ils ne font qu'aboyer
Et mordent parfois si nous osons sourciller.
Pensent-ils ainsi parvenir à oublier
La longueur de leur chaîne, le poids de leur collier ?


L'imbécile

Il n'est point de personne plus sûre de soi,
Que l'imbécile qui ose tout, sans doute,
Et sans que rien ne l'arrête sur sa route.
L'imbécile a la foi et ne suit que sa loi.
   
Timidité, respect, ce sont de lourds boulets
Qu'il ne s'embarrassera jamais de traîner.
Si nous évitons de nous laisser entraîner,
Lui, sans nul complexe, se laissera aller.
   
Mais gardons espoir ! Ce n'est pas forcément vain!
Peut-être avons-nous tort de nous sous-estimer ?
Nos qualités ne demandent qu'à s'exprimer :

Écrire à l'auteur : kevisa@lagoon.nc


L'art du ridicule

Petit livres, rouge ou vert selon les contrées,
Pensées sacrées des guides et des prophètes,
Tous les grands illuminés sont de la fête,
Toutes les absurdités peuvent se rencontrer.
   
Au nom du divin ou des grands philosophes,
Le passé nous a enseignés, assurément,
Que l'homme est le plus grotesque des instruments,
Pour réaliser les meilleures catastrophes.

Quels passagers sensés se seraient embarqués
Avec un timonier amant de sirènes
Qui le bercent de leurs mélopées de haine ?
Qui d'autre que ceux à la raison étriquée ? 

Quels voyageurs auraient pris de nuit le chemin
Éclairé par la faible lampe d'un passeur
Qui cherche lui-même à percer cette noirceur ?
Qui, sinon ceux qui ont peur et qui tendent la main ?

Bien souvent, il n'y a pas pléthore de choix ;
Seulement se taire et suivre en marchant au pas ;
Et ne pas discuter ce qu'on ne comprend pas,
Ignorant même qu'il existe d'autres lois.

Bien sûr, il n'est point besoin de fascicules
Pour apprendre un mauvais scénario funeste,
Mais il n'est pas d'une aide des plus modestes
Pour exceller dans cet art du ridicule.

La farce pourrait bien nous faire tous rire ;
Ce serait une erreur et surtout oublier
Que le ridicule peut aussi les tuer ;
Et que nous pourrions, nous aussi, tous en mourir.

La route vers nulle part

C'est une très longue route vers nulle part.
Tracée par quelque géomètre facétieux.
Ouvragée par des cohortes de cantonniers
Précédant les rangs bien serrés des voyageurs.

De chaque côté, montagne et précipice
Rendent impossible tout chemin de traverse.
Après des années de marche et quelques chutes,
Le pas se fait plus traînant bien que résigné.

La fin du voyage est espérée et redoutée.
Ceux que l'on suivait sont, eux, déjà arrivés.
Prendre leurs traces ne donne aucun réconfort,
Seulement de la tristesse pour ceux qui suivent.

Tant d'efforts, tant de blessures, pour quel accueil ?
Là-bas, il y aura-t-il seulement quelqu'un
Pour nous dire les raisons de cette épreuve ?
Ou rien d'autre que le silence et le néant ?

 

L'enfant de la rue

La vie dans la rue n'a plus de secret pour lui,
Même aux heures les plus avancées de la nuit ;
Je ne sais quel acharnement d'un mauvais sort
L'a conduit à en connaître tous les ressors.
Mais gardez donc pour vous vos réflexions stupides,
Si son âme juvénile a déjà des rides,
C'est parce que des gens comme nous l'ont laissé
Sur le bord du chemin, se sentir délaissé,
Méprisé, trahi, exclu, inutile.
Sans penser à demain, pour survivre il pratique
En expert toutes sortes de petits trafics.
   
Qu'importe ! Retournons à nos plaisirs futiles !
Nous ne pouvons pas nous charger de la misère,
Ce fléau qui gangrène la planète entière ;
Nous ne pouvons pas aider ces gens si nombreux !
Quoi que nous fassions, ce serait tellement peu !
Ce discours soulage peut-être la conscience
En justifiant notre coupable indifférence.
Lorsque l'on dit ne pas vouloir en aider qu'un,
En général, on ne vient au secours d'aucun.



   
L'apologie du mensonge  
   
L'important n'est pas d'avoir tort ou bien raison,
Car la vérité change selon les saisons.
Celui qui, aujourd'hui, est de tous écouté,
Sera, demain, méprisé, raillé, rejeté.
Il vous faut donc prendre la direction du vent,
Avant que d'exprimer le moindre sentiment.
Et que vous importe s'il est sincère ou pas,
L'essentiel est de ne pas se tromper de pas
Dans la danse burlesque du grand carnaval.
Soyez très prudent. Toute erreur serait fatale!
Ne cherchez pas à comprendre le bien-fondé,
Votre âme n'aura pas besoin d'être sondée
Pour s'attacher à bien servir vos intérêts.
Soyez malins et le poisson sera ferré !
On vous prodiguera les plus grandes largesses
Et on célébrera votre grande sagesse,
Si vous savez, non comprendre, mais écouter
Tous les discours fumeux, sans être déroutés,
Et applaudir, non celui qui sait parler vrai,
Mais l'autre aux propos venimeux et acérés.
On vous saura gré d'être un éminent menteur,
Mais pas un de ces pitoyables amateurs
Ne sachant pas que le mensonge d'aujourd'hui
Est celui que la vérité d'hier induit.
L'erreur est humaine? Il n'est rien de plus vrai !
Alors soyez diaboliques, persévérez !  

 

J'irai un jour

C’est un jardin calme et tranquille,
A l’écart de la grande ville ;
On peut y goûter la quiétude
D’une sereine solitude ;
J'aime cet endroit où j'irai un de ces jours
Et j'espère y passer un paisible séjour.
Là-bas, lorsque vous viendrez me rendre visite,
Ce sera à votre heure, sans que je vous invite.
Vous m'offrirez, sans doute, un bouquet de fleurs,
Mais, de grâce, ne l'arrosez pas de vos pleurs,
Car je ne serai pas à plaindre dans l'allée
Du beau et frais cimetière des azalées.


   
Le misanthrope  
   
On le prend pour un fou car il parle à son chien,
Mais, avant, c'est à eux qu'il s'était adressé.
Personne n'écoutait, alors il s'est lassé.
Désormais, on lui parle, mais lui n'entend rien. 

La curiosité a remplacé le mépris.
Amusés ou émus, certains viennent à lui.
Ceux qui hier l'ignoraient, l'observent surpris.
Mais leur sollicitude nouvelle l'ennuie. 

Il avait tant voulu être de leurs proches,
Mais il n'avait reçu aucun signe en retour.
Pour autant, il ne leur fait aucun reproche.
Il veut simplement qu'on le laisse pour toujours. 

Il a choisi de suivre son propre sentier :  
Il peut bien les faire rire ou faire pitié,  
Il s'en moque, seul son chien lui est important.  
Il n'a plus besoin de personne maintenant.  
C'est l'histoire d'un vieux bonhomme solitaire,  
Comme on en voit beaucoup, des plus ordinaires.

Il bénit ce rendez-vous manqué avec eux.
Ces gens murmurent, il les entend jacasser ;
Il préfère les abandonner à leurs jeux ;
Et s'ils lui sourient, il les voit grimacer.
   
Unique et fidèle compagnon de sa vie.
Comme si les mots qu'il lui dit étaient sacrés,
La bête l'écoute, attentionnée et ravie
De garder tout pour elle comme des secrets. 

C'est décidément un curieux personnage
Qui fuit tous ses semblables pour un animal.
Son chien n'est même pas de race et sans âge.
C'est un misanthrope. Il n'y a pas grand mal. 

Il a choisi de suivre son propre sentier :  
Il peut bien les faire rire ou faire pitié,  
Il s'en moque, seul son chien lui est important.  
Il n'a plus besoin de personne maintenant.  
C'est l'histoire d'un vieux bonhomme solitaire,  
Comme on en voit beaucoup, des plus ordinaires.

 

Près des yeux, loin du cœur  

Que faut-il pour nous émouvoir
Du malheur de tous nos frères ?
Avons-nous vraiment un pouvoir,
Sinon celui des prières ?
   
C'est un enfant agonisant,
Sur l'écran de télévision,
Un corps mutilé et gisant,
Une insoutenable vision.

Ou c'est une femme inconnue,
Brimée, mise en servitude,
Interdite de tête nue,
Loin, sous d'autres latitudes. 

Une obole généreuse,
Dans le sein des saints donateurs,
A une contrée malheureuse,
Et nous sommes alors bienfaiteurs.
   
La bonté et la compassion
Qui sont dans notre nature,
Ne font pourtant pas attention
A de proches aventures.

Une détresse ordinaire,
De l'autre côté du pallier,
D'un pauvre vieux solitaire,
A qui on ne veut se lier.
   
Ou la tragédie banale
De ce mendiant sans abri,
Qu'une parole amicale
Pourrait sortir un peu du gris. 

La misère, certainement,
Loin, est moins contagieuse.
Celle d'ici, assurément,
Semble si fallacieuse. 

Rien qu'un geste lapidaire
Pour étouffer la conscience
Et nous sentir solidaires,
Surtout par bienséance. 

C'est déjà ça ! Plus que d'autres!
C'est une aide salutaire.
Mais n'oublions pas les nôtres
Dans l'action humanitaire.

 

Vieillesse  

La ville et le vieux
Sont avancés dans l'automne.
Presque déjà en hiver.
Chaque jour pluvieux,
Chaque jour plus vieux,
Le froid s'installe
Et le gris vire au blanc.
Certains jours,
Les artères se bouchent,
Les bouches d'égouts débordent,
Le dégoût borde la bouche.
Dans la nuit et l'ennui,
Le vieux veille dans la vieille ville.


   
Terreur

Comédie inhumaine d'acteurs indigents
Accablant le public de leur jeu affligeant.
Réprouvés des Arts comme des Dieux, rejetés.
Néanmoins persistant à se croire inspirés,
Absolument convaincus d'être les élus.
Gardiens d'une Foi dévoyée, guerriers perdus.
Extrémistes, intégristes sûrs de leur Droit.

Exhibant leur démence au nom de leur Loi,
Tuant l'Humanité, la plongeant dans la peur.

Fabricants de malheur, assassins du bonheur,
Obsédés de vertu jusqu'au sacrifice.
Lâches autant que cruels vis-à-vis de leurs fils,
Indignes de leurs femmes, de tout avenir,
Etouffant la voix du Dieu qu'ils disent servir.


 
Le vrai-faux paradis  

J'ai vu le paradis dans d'étranges couleurs,
Et puis du noir et des nuances de gris,
Une beauté inquiétante qui m'a fait peur,
Jusqu'au moment où un bel ange m'a souri; 

Sans parler, dans un halo sombre et lumineux,
l m'a tendu et donné du bonheur,
M'a fait découvrir un paysage harmonieux
Comme en négatif d'une photo en couleurs; 

Il semblait si heureux que je revienne à lui,
Dans la maison de la plénitude éternelle;
Je viendrai chercher une dose cette nuit
Et une seringue qu'il couve sous son aile.

 
Le rêve d'une  étoile  

Longtemps après qu'elles aient cessé d'exister,
Les belles étoiles continuent à briller.
Est-ce la preuve que le beau n'existe pas ?
Après que notre amour ait cessé d'exister,
Chaque seconde, je continue à t'aimer.
Est-ce la preuve que l'amour n'existe pas ?

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

Ce soir, je lèverai les yeux vers le ciel ;
Je ne verrai qu'une étoile, la plus belle,
C'est la seule qui ne veut plus briller pour moi.
Des millions de papillons dans la lumière
Viennent me piquer les yeux et les paupières
A chacune de ces nuits où je pense à toi.

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

Peut-être, pour un peu moins ou pour mieux souffrir,
Je n'ai gardé que le meilleur de ton souvenir,
Comme le refrain d'une très vieille chanson
Dont j'ai oublié depuis longtemps les couplets.
Je sais que tu peux bien faire tout ce qui te plaît,
Mais je t'aime, en dépit de toute raison.

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

Réalité, rêve ? Rêve, Réalité ?
Où est la vérité ? Je préfère rêver.

J’ai enfin trouvé la réponse à ma question :  
Je t'aime encore,  je préfère rêver.

 

Serial Killer

Tous les limiers du monde sont sur sa trace.
Il continue de sévir, ce serial killer.
Et son seul nom suffit à répandre la peur.
Qui pourra mettre fin à cette menace ?
   
Sa sinistre route est jonchée de victimes.
Il nous a tous changés, même les plus audacieux,
Nous rendant frileux, craintifs et presque peureux,
Sûrs que notre vie ne vaut plus un centime.
   
Nul n'échappe à sa folie meurtrière.
Rien ne l'arrête, ni âge, ni frontière.
Il n'épargne ni les faibles ni les puissants. 

Certains considèrent cette calamité,
L'exécution d'une punition méritée.
C'est un ennemi à abattre : le SIDA.


Sans domicile

Sur les bancs publics, les quais de gares,   
Il vit, sans marquer le paysage,
Ni tous ceux qui le toisent sans égards,
Ce vieillard au-delà de tout âge.

Le long du fleuve et sur les ponts,
Des amoureux s'interpellent.
Mais lui, des murs et un toit de cartons
L'empêchent de trouver la nuit belle.

Il n'a pas de porte à laisser ouverte,
C'est pourquoi personne n'entre jamais.
Pas même une main ne s'est offerte,
Alors, il attend sans rien réclamer.

D'ailleurs, que pourrait-il bien exiger
De la foule des gens respectables
Tous assis sur l'édifice érigé
Avec soin de leur labeur admirable ?

Il n'a vraiment pas besoin de notre pitié,  
Mais si nous sommes un peu capables d'amitié,  
Rien qu'une main sur l'épaule, un sourire,  
Et quelque chose de banal à lui dire,  
Juste un peu de chaleur, de solidarité,  
Pour qu'il se rappelle qu'il a le droit d'exister.  

C'est à chacun selon ses mérites,
Qui sait, c'est peut-être aussi son credo ?
Son regard est des plus explicites :
Il sait bien que la vie n'est pas cadeau.

Il survit chaque jour sans faire exprès,
Nous devrions le voir d'un peu plus près,
Tenter de cacher sa solitude
Sous le rituel des habitudes.

Ce qui, pour un autre, est insouciance
N'est que la suite de son errance,
Qui se poursuit toujours à son réveil,
Et même dans ses rêves sans soleil.

Est-ce qu'il a un jour lui-même  choisi
De n'être rien, qu'un sans domicile ?
Est-ce le destin et ses facéties ?
Ou un bel égoïsme imbécile ?

Il n'a vraiment pas besoin de notre pitié,  
Mais si nous sommes un peu capables d'amitié,  
Rien qu'une main sur l'épaule, un sourire,  
Et quelque chose de banal à lui dire,  
Juste un peu de chaleur, de solidarité,  
Pour qu'il se rappelle qu'il a le droit d'exister.  

   
Une vie de rêve  

Il vit aux Philippines ou  au Pakistan,
Ou bien ailleurs, dans un pays d'un autre temps.
Au réveil, un thé ou encore un bouillon clair
Et il se précipite dehors en plein air. 

Le soleil n'est pas levé lorsqu'il commence
Sa journée de labeur qui passe en silence.
Et le soir venu, il s'en retourne, fourbu,
S'écrouler sur sa paillasse, sa soupe bue.

C'est toujours une extraordinaire chance
S'il parvient, quelquefois, à vivre un dimanche.
Mais ce n'est pas toujours pour autant du repos ;
Souvent, il va travailler dans les entrepôts.
   
Toutes les occasions sont bonnes pour gagner
Un peu plus, pour un peu mieux vivre et épargner
A sa famille, d'être encore plus miséreux
Que la veille et que tous ceux qu'il voit autour d'eux. 

Je ne sais pas s'il a déjà rêvé la nuit,
Puisque tous les gens qu'il connaît sont comme lui,
Il n'a pour seul modèle que la souffrance.
Il n'a que sept ans, mais très loin de l'enfance.

 

La Dame du Lac

Je l'ai revue cette nuit la Dame du Lac.
Qui m'a demandé si j'avais vu Lancelot.
Je n'ai pu lui répondre, transi par le trac.
Triste, elle s'en est retournée veiller dans ses eaux.

A chaque fois, je cherche en vain le courage
De la supplier qu'elle oublie ce bellâtre,
Et je dois la quitter le cœur plein de rage,
Car, lui, peut se passer d'elle pour combattre.

Toutes mes nuits sont comme les bords d'un lac  
Et dans mes rêves, je retrouve ma Dame  
Qui garde Excalibur protégée dans un sac.
Je ne suis pas chevalier, c'est là  mon drame ;
Dans mes yeux, il n'y a que de l'eau, l'eau d'un lac  
Qui noie mon cœur qui attend la Dame du Lac.  

Mais je dirai, à une prochaine occasion,
Qu'il n'y a pas besoin pour sauver le monde
Du manque d'amour, des savantes décisions
De prétentieux autour d'une table ronde.

Parfois, on a besoin de temps pour comprendre
L'ennui de livrer d'inutiles batailles ;
Seule la conquête d'un cœur peut nous surprendre
Et vaut davantage que toutes les médailles. 

Toutes mes nuits sont comme les bords d'un lac
Et dans mes rêves, je retrouve ma Dame
Qui garde Excalibur protégée dans un sac.
Je ne suis pas chevalier, c'est là  mon drame ;
Dans mes yeux, il n'y a que de l'eau, l'eau d'un lac  
Qui noie mon cœur qui attend la Dame du Lac.  

   
La rumeur

Elle déboule dans les quartiers,
Les villes, les villages,
Les plus petits hameaux,
Jusque dans les rases campagnes.
Elle traverse les rues,
Les places et les prés,
Force les portes des logis,
S'invite chez les insolents
Et bouscule les indolents ;
Elle laisse souvent derrière elle
Un ou deux gisants,
Tombés au champ de déshonneur,
Fauchés par les mots qui tuent ;
Rien ni personne
N'arrête la rumeur.

Ecrire à l'auteur : kevisa@lagoon.nc

 

 

Retour Portail