Dix-huitième siècle

 

Jean Baptiste Rousseau



Ode tirée du Psaume CXLV
FAIBLESSE DES HOMMES,
GRANDEUR DE DIEU

Mon âme, louez le Seigneur ;
Rendez un légitime honneur
À l'objet éternel de vos justes louanges.
Oui, mon Dieu, je veux désormais 
Partager la gloire des anges,
Et consacrer ma vie à chanter vos bienfaits.

Renonçons au stérile appui
Des grands qu'on implore aujourd'hui ;
Ne fondons point sur eux une espérance folle.
Leur pompe, indigne de nos vœux, 
N'est qu'un simulacre frivole ;
Et les solides biens ne dépendent pas d'eux.

Comme nous, esclaves du sort,
Comme nous, jouets de la mort,
La terre engloutira leurs grandeurs insensées ; 
Et périront en même jour 
Ces vastes et hautes pensées
Qu'adorent maintenant ceux qui leur font la cour.

Dieu seul doit faire notre espoir ;
Dieu, de qui l'immortel pouvoir
Fit sortir du néant le ciel, la terre, et l'onde ;
Et qui, tranquille au haut des airs,
Anima d'une voix féconde
Tous les êtres semés dans ce vaste univers.

Heureux qui du ciel occupé,
Et d'un faux éclat détrompé,
Met de bonne heure en lui toute son espérance !
Il protège la vérité, 
Et saura prendre la défense
Du juste que l'impie aura persécuté.

C'est le Seigneur qui nous nourrit ; 
C'est le Seigneur qui nous guérit :
Il prévient nos besoins ; il adoucit nos gênes ;
Il assure nos pas craintifs ; 
Il délie, il brise nos chaînes ;
Et nos tyrans par lui deviennent nos captifs.

Il offre au timide étranger 
Un bras prompt à le protéger ;
Et l'orphelin en lui retrouve un second père :
De la veuve il devient l'époux ; 
Et par un châtiment sévère
Il confond les pécheurs conjurés contre nous.

Les jours des rois sont dans sa main :
Leur règne est un règne incertain,
Dont le doigt du Seigneur a marqué les limites ; 
Mais de son règne illimité 
Les bornes ne seront prescrites
Ni par la fin des temps, ni par l'éternité.




Stances


Que l'homme est bien, durant sa vie,
Un parfait miroir de douleurs, 
Dès qu'il respire, il pleure, il crie 
Et semble prévoir ses malheurs.

Dans l'enfance toujours des pleurs, 
Un pédant porteur de tristesse, 
Des livres de toutes couleurs, 
Des châtiments de toute espèce.

L'ardente et fougueuse jeunesse 
Le met encore en pire état. 
Des créanciers, une maîtresse 
Le tourmentent comme un forçat.

Dans l'âge mûr, autre combat, 
L'ambition le sollicite. 
Richesses, dignités, éclat, 
Soins de famille, tout l'agite.

Vieux, on le méprise, on l'évite.
Mauvaise humeur, infirmité. 
Toux, gravelle, goutte, pituite, 
Assiègent sa caducité.

Pour comble de calamité, 
Un directeur s'en rend le maître. 
Il meurt enfin, peu regretté. 
C'était bien la peine de naître !



Ode tirée du Cantique d'Ézéchias
J'ai vu mes tristes journées 
Décliner vers leur penchant ; 
Au midi de mes années 
Je touchais à mon couchant :
La Mort, déployant ses ailes, 
Couvrait d'ombres éternelles 
La clarté dont je jouis ; 
Et, dans cette nuit funeste, 
Je cherchais en vain le reste 
De mes jours évanouis.

Grand Dieu, votre main réclame 
Les dons que j'en ai reçus ; 
Elle vient couper la trame 
Des jours qu'elle m'a tissus :
Mon dernier soleil se lève 
Et votre souffle m'enlève 
De la terre des vivants, 
Comme la feuille séchée, 
Qui, de sa tige arrachée, 
Devient le jouet des vents.

Comme un lion plein de rage, 
Le mal a brisé mes os ; 
Le tombeau m'ouvre un passage 
Dans ses lugubres cachots. 
Victime faible et tremblante, 
A cette image sanglante 
Je soupire nuit et jour ; 
Et, dans ma crainte mortelle, 
Je suis comme l'hirondelle 
Sous les griffes du vautour.

Ainsi, de cris et d'alarmes,
Mon mal semblait se nourrir ;
Et mes yeux, noyés de larmes,
Etaient lassés de s'ouvrir.
Je disais à la nuit sombre :
Ô nuit, tu vas dans ton ombre
M'ensevelir pour toujours !
Je redisais à l'aurore :
Le jour que tu fais éclore
Est le dernier de mes jours !

Mon âme est dans les ténèbres,
Mes sens sont glacés d'effroi :
Ecoutez mes cris funèbres,
Dieu juste, répondez-moi.
Mais enfin sa main propice
A comblé le précipice
Qui s'entr'ouvrait sous mes pas :
Son secours me fortifie, 
Et me fait trouver la vie 
Dans les horreurs du trépas.

Seigneur, il faut que la terre
Connaisse en moi vos bienfaits :
Vous ne m'avez fait la guerre
Que pour me donner la paix.
Heureux l'homme à qui la grâce
Départ ce don efficace,
Puisé dans ces saints trésors ;
Et qui, rallumant sa flamme,
Trouve la santé de l'âme
Dans les souffrances du corps !

C'est pour sauver la mémoire 
De vos immortels secours ; 
C'est pour vous pour votre gloire, 
Que vous prolongez nos jours. 
Non, non, vos bontés sacrées 
Ne seront point célébrées 
Dans l'horreur des monuments :
La Mort, aveugle et muette, 
Ne sera point l'interprète 
De vos saints commandements.

Mais ceux qui de sa menace, 
Comme moi, sont rachetés, 
Annonceront à leur race 
Vos célestes vérités. 
J'irai, Seigneur, dans vos temples, 
Réchauffer par mes exemples 
Les mortels les plus glacés, 
Et, vous offrant mon hommage,
Leur montrer l'unique usage 
Des jours que vous leur laissez.




Stances


Que l'homme est bien, durant sa vie,
Un parfait miroir de douleurs, 
Dès qu'il respire, il pleure, il crie 
Et semble prévoir ses malheurs.

Dans l'enfance toujours des pleurs, 
Un pédant porteur de tristesse, 
Des livres de toutes couleurs, 
Des châtiments de toute espèce.

L'ardente et fougueuse jeunesse 
Le met encore en pire état. 
Des créanciers, une maîtresse 
Le tourmentent comme un forçat.

Dans l'âge mûr, autre combat, 
L'ambition le sollicite. 
Richesses, dignités, éclat, 
Soins de famille, tout l'agite.

Vieux, on le méprise, on l'évite.
Mauvaise humeur, infirmité. 
Toux, gravelle, goutte, pituite, 
Assiègent sa caducité.

Pour comble de calamité, 
Un directeur s'en rend le maître. 
Il meurt enfin, peu regretté. 
C'était bien la peine de naître 


°°°°°°°°°°°

 

André Chénier (1762-1794)


Toujours ce souvenir

Toujours ce souvenir m'attendrit et me touche,
Quand lui-même appliquant la flûte sur ma bouche,
Riant et m'asseyant sur lui, près de son coeur,
M'appelait son rival et déjà son vainqueur.
Il façonnait ma lèvre inhabile et peu sûre
À souffler une haleine harmonieuse et pure ;
Et ses savantes mains prenaient mes jeunes doigts,
Les levaient, les baissaient, recommençaient vingt fois,
Leur enseignant ainsi, quoique faibles encore,
À fermer tour à tour les trous du buis sonore.

 

François-René de Chateaubriand

1768 - 1848

 

« La solitude absolue, le spectacle de la nature, me plongèrent bientôt dans un état presque impossible à décrire. Sans parents, sans amis, pour ainsi dire seul sur la terre, n'ayant point encore aimé, j'étais accablé d'une surabondance de vie. Quelquefois je rougissais subitement, et je sentais couler dans mon cœur, comme des ruisseaux d'une lave ardente ; quelquefois je poussais des cris involontaires, et la nuit était également troublée de mes songes et de mes veilles. Il me manquait quelque chose pour remplir l'abîme de mon existence : je descendais dans la vallée, je m'élevais sur la montagne, appelant de toute la force de mes désirs l'idéal objet d'une flamme future ; je l'embrassais dans les vents ; je croyais l'entendre dans les gémissements du fleuve ; tout était ce fantôme imaginaire, et les astres dans les cieux, et le principe même de vie dans l'univers.
   « Toutefois cet état de calme et de trouble, d'indigence et de richesse, n'était pas sans quelques charmes : un jour je m'étais amusé à effeuiller une branche de saule sur un ruisseau, et à attacher une idée à chaque feuille que le courant entraînait. Un roi qui craint de perdre sa couronne par une révolution subite, ne ressent pas des angoisses plus vives que les miennes, à chaque accident qui menaçait les débris de mon rameau. Ô faiblesse des mortels ! Ô enfance du cœur humain qui ne vieillit jamais ! Voilà donc à quel degré de puérilité notre superbe raison peut descendre ! Et encore est-il vrai que bien des hommes attachent leur destinée à des choses d'aussi peu de valeur que mes feuilles de saule.
   « Mais comment exprimer cette foule de sensations fugitives, que j'éprouvais dans mes promenades ? Les sons que rendent les passions dans le vide d'un cœur solitaire ressemblent au murmure que les vents et les eaux font entendre dans le silence d'un désert : on en jouit, mais on ne peut les peindre.
   « L'automne me surprit au milieu de ces incertitudes : j'entrai avec ravissement dans les mois des tempêtes. Tantôt j'aurais voulu être un de ces guerriers errant au milieu des vents, des nuages et des fantômes ; tantôt j'enviais jusqu'au sort du pâtre que je voyais réchauffer ses mains à l'humble feu de broussailles qu'il avait allumé au coin d'un bois. J'écoutais ses chants mélancoliques, qui me rappelaient que dans tout pays, le chant naturel de l'homme est triste, lors même qu'il exprime le bonheur. Notre cœur est un instrument incomplet, une lyre où il manque des cordes, et où nous sommes forcés de rendre les accents de la joie sur le ton consacré aux soupirs.
   « Le jour, je m'égarais sur de grandes bruyères terminées par des forêts. Qu'il fallait peu de chose à ma rêverie ! une feuille séchée que le vent chassait devant moi, une cabane dont la fumée s'élevait dans la cime dépouillée des arbres, la mousse qui tremblait au souffle du nord sur le tronc d'un chêne, une roche écartée, un étang désert où le jonc flétri murmurait ! Le clocher solitaire s'élevant au loin dans la vallée, a souvent attiré mes regards ; souvent j'ai suivi des yeux les oiseaux de passage qui volaient au-dessus de ma tête. Je me figurais les bords ignorés, les climats lointains où ils se rendent ; j'aurais voulu être sur leurs ailes. Un secret instinct me tourmentait ; je sentais que je n'étais moi-même qu'un voyageur ; mais une voix du ciel semblait me dire : « Homme, la saison de ta migration n'est pas encore venue ; attends que le vent de la mort se lève, alors tu déploieras ton vol vers ces régions inconnues que ton cœur demande. »
   « Levez-vous vite, orages désirés, qui devez emporter René dans les espaces d'une autre vie ! Ainsi disant, je marchais à grands pas, le visage enflammé, le vent sifflant dans ma chevelure, ne sentant ni pluie ni frimas, enchanté, tourmenté, et comme possédé par le démon de mon cœur. 

   [...]

Pour René ! Merci !

 

Décidément, ce cher Voltaire avait tous les talents... On l'a croisé l'an
dernier librettiste ( http://www.orculture.com/2002/21novembre.htm ), mais il
était également poète. Voici l'une de ses oeuvres en vers.

A Mme du Châtelet

"Si vous voulez que j'aime encore,
Rendez-moi l'âge des amours ;
Au crépuscule de mes jours
Rejoignez, s'il se peut, l'aurore.

Des beaux lieux où le dieu du vin
Avec l'Amour tient son empire,
Le Temps, qui me prend par la main,
M'avertit que je me retire.

De son inflexible rigueur
Tirons au moins quelque avantage.
Qui n'a pas l'esprit de son âge,
De son âge a tout le malheur.

Laissons à la belle jeunesse
Ses folâtres emportements.
Nous ne vivons que deux moments :
Qu'il en soit un pour la sagesse.

Quoi! pour toujours vous me fuyez,
Tendresse, illusion, folie,
Dons du ciel, qui me consoliez
Des amertumes de la vie !

On meurt deux fois, je le vois bien :
Cesser d'aimer et d'être aimable,
C'est une mort insupportable ;
Cesser de vivre, ce n'est rien."

Ainsi je déplorais la perte
Des erreurs de mes premiers ans ;
Et mon âme, aux désirs ouverte,
Regrettait ses égarements.

Du ciel alors daignant descendre,
L'Amitié vint à mon secours ;
Elle était peut-être aussi tendre,
Mais moins vive que les Amours.

Touché de sa beauté nouvelle,
Et de sa lumière éclairé,
Je la suivis ; mais je pleurai
De ne pouvoir plus suivre qu'elle.


Philippe Desporte 
(1661-1743)


Vous n'aimez rien que vous

Vous n'aimez rien que vous, de vous-même maîtresse,
Toute perfection en vous seule admirant,
En vous votre désir commence et va mourant,
Et l'amour seulement pour vous-même vous blesse.

Franche et libre de soin, votre belle jeunesse
D'un oeil cruel et beau mainte flamme tirant,
Brûle cent mille esprits qui votre aide implorant
N'éprouvent que fierté, mépris, haine et rudesse.

De n'aimer que vous-même est en votre pouvoir,
Mais il n'est pas en vous de m'empêcher d'avoir
Votre image en l'esprit, l'aimer d'amour extrême ;

Or l'Amour me rend vôtre, et si vous ne m'aimez,
Puisque je suis à vous, à tort vous présumez,
Orgueilleuse beauté, de vous aimer vous-même.

 

...........

              

Chanson

Ô bien heureux qui peut passer sa vie
Entre les siens franc de haine et d'envie,
Parmi les champs, les forêts et les bois,
Loin du tumulte et du bruit populaire,
Et qui ne vend sa liberté pour plaire
Aux passions des princes et des rois !

Il n'a souci d'une chose incertaine;
Il ne se plaît d'une espérance vaine ;
Nulle faveur ne le va décevant,
De cent fureurs il n'a l'âme embrasée
Et ne maudit sa jeunesse abusée
Quand il ne trouve à la fin que du vent.

Il ne frémit quand la mer courroucée
Entre ses flots contrairement poussée
Des vents émus soufflant, horriblement,
Et quand la nuit à son aise il sommeille
Une trompette en sursaut ne l'éveille
Pour l'envoyer du lit au monument.

L'ambition son courage n'attise ;
D'un fard trompeur son âme ne déguise ;
Il ne se plaît à violer sa foi ;
Des grands seigneurs l'oreille il n'importune ;
Mais, en vivant content de sa fortune,
Il est sa cour, sa faveur et son roi.

Je vous rends grâce, ô déités sacrées
Des monts, des eaux, des forêts et des prées,
Qui me privez de pensers soucieux,
Et qui rendez ma volonté contente,
Chassant bien loin ma misérable attente
Et les désirs des coeurs ambitieux.

Dedans mes champs ma pensée est enclose;
Si mon corps dort, mon esprit se repose,
Un soin cruel ne le va dévorant.
Au plus matin la fraîcheur me soulage ;
S'il fait trop chaud je me mets à l'ombrage,
Et s'il fait froid je m'échauffe en courant.

Si je ne loge en ces maisons dorées,
Au front superbe, aux voûtes peinturées
D'azur, d'émail et de mille couleurs,
Mon oeil se plat des trésors de la plaine
Riche d'oeillets, de lis, de marjolaine
Et du beau teint des printanières fleurs.

Dans les palais enflés de vaine pompe,
L'ambition, la faveur qui nous trompe,
Et les soucis logent communément;
Dedans nos champs se retirent les fées,
Reines des bois à tresses décoiffées,
Les jeux, l'amour et le contentement.

Ainsi vivant, rien n'est qui ne m'agrée :
J'ois des oiseaux la musique sacrée,
Quand au matin ils bénissent les cieux,
Et le doux son des bruyantes fontaines
Qui vont coulant de ces roches hautaines
Pour arroser nos prés délicieux.

Que de plaisir de voir deux colombelles,
Bec contre bec, en trémoussant des ailes,
Mille baisers se donner tour à tour,
Puis, tout ravi de leur grâce naïve,
Dormir au frais d'une source d'eau vive,
Dont le doux bruit semble parler d'amour !

Que de plaisir de voir sous la nuit brune,
Quand le soleil a fait place à la lune,
Au fond des bois les nymphes s'assembler,
Montrer au vent leur gorge découverte,
Danser, sauter, se donner cotte-verte,
Et sous leurs pas tout l'herbage trembler !

Le bal fini je dresse en haut la vue,
Pour voir le teint de la lune cornue,
Claire, argentée, et me mets à penser
Au sort heureux du pasteur de Latmie;
Lors je souhaite une aussi belle amie,
Mais je voudrais en veillant l'embrasser.

Ainsi la nuit je contente mon âme,
Puis quand Phébus de ses rais nous enflamme
J'essaye encor mille autres jeux nouveaux ;
Diversement mes plaisirs j'entrelace,
Ores je pêche, or'  je vais à la chasse,
Et or' je dresse embuscade aux oiseaux.

Je fais l'amour mais c'est de telle sorte
Que seulement du plaisir j'en rapporte,
N'engageant point ma chère liberté ;
Et quelques lacs que ce dieu puisse faire
Pour m'attraper, quand je m'en veux distraire,
J'ai le pouvoir comme la liberté.

Douces brebis, mes fidèles compagnes,
Haies, buissons, forêts, prés et montagnes,
Soyez témoins de mon contentement !
Et vous, ô dieux, faites, je vous supplie,
Que cependant que durera ma vie
Je ne connaisse un autre changement.

                       

°°°°°°°°°°°

 

        André Chénier 

              1762 - 1794

      La jeune Tarentine

Pleurez, doux alcyons, ô vous, oiseaux sacrés,
Oiseaux chers à Thétis, doux alcyons, pleurez.
Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine.
Un vaisseau la portait aux bords de Camarine.
Là l'hymen, les chansons, les flûtes, lentement,
Devaient la reconduire au seuil de son amant.
Une clef vigilante a pour cette journée
Dans le cèdre enfermé sa robe d'hyménée
Et l'or dont au festin ses bras seraient parés
Et pour ses blonds cheveux les parfums préparés.
Mais, seule sur la proue, invoquant les étoiles,
Le vent impétueux qui soufflait dans les voiles
L'enveloppe. Étonnée, et loin des matelots,
Elle crie, elle tombe, elle est au sein des flots.
Elle est au sein des flots, la jeune Tarentine.
Son beau corps a roulé sous la vague marine.
Thétis, les yeux en pleurs, dans le creux d'un rocher
Aux monstres dévorants eut soin de la cacher.
Par ses ordres bientôt les belles Néréides
L'élèvent au-dessus des demeures humides,
Le portent au rivage, et dans ce monument
L'ont, au cap du Zéphyr, déposé mollement.
Puis de loin à grands cris appelant leurs compagnes,
Et les Nymphes des bois, des sources, des montagnes,
Toutes frappant leur sein et traînant un long deuil,
Répétèrent : « hélas ! » autour de son cercueil.
Hélas ! chez ton amant tu n'es point ramenée.
Tu n'as point revêtu ta robe d'hyménée.
L'or autour de tes bras n'a point serré de nœuds.
Les doux parfums n'ont point coulé sur tes cheveux.

 

(Recueil : Poésies Antiques)


Je sais, quand le midi ...

Je sais, quand le midi leur fait désirer l'ombre, 
Entrer à pas muets sous le roc frais et sombre, 
D'où parmi le cresson et l'humide gravier 
La naïade se fraye un oblique sentier.
Là j'épie à loisir la nymphe blanche et nue 
Sur un banc de gazon mollement étendue, 
Qui dort, et sur sa main, au murmure des eaux, 
Laisse tomber son front couronné de roseaux.

 

Pour André : merci !

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Dernière mise à jour : dimanche 30 novembre 2003